[Critique] Balada Triste (Alex de la Iglesia)

Présenté lors d’une avant-première par son réalisateur comme un film désagréable, comportant de nombreuses scènes de violence et de sexe, Balada Triste conte la rivalité de deux clowns pour le cœur d’une belle acrobate. Pas aussi indigeste que ne voudrait le faire croire son géniteur avec ironie, Balada Triste est un film étrange, inégal mais distrayant.

Monstres de foire

En pleine guerre civile espagnole, des soldats républicains font irruption dans un cirque. Tous les hommes sont appelés à se battre. Ainsi, un clown aux boucles blondes, armé d’une machette, se jette dans le chaos du combat contre les troupes nationalistes. Cette explosion de violence burlesque sert à introduire le héros de Balada Triste, Javier, fils du clown qui sera emprisonné par les hommes de Franco. L’enfant, souhaitant suivre les traces de son père, reçoit deux conseils de celui-ci : jouer le clown triste, ayant eu une enfance volée par la guerre, et se libérer dans la vengeance.
1973, Javier (Carlos Areces, formidable acteur aux traits proches de Nick Frost) débarque dans un cirque pour offrir ses services de clown triste. C’est la découverte de personnages hauts en couleur, dont un ghost rider malchanceux et solide, mais surtout de Sergio (Antonio de la Torre), clown tyrannique et de sa compagne acrobate, la voluptueuse Natalia (Carolina Bang). Alex de la Iglesia jongle avec ce trio de personnages avec beaucoup d’humour noir et d’originalité. Sa mise en scène dynamique, la photographie terne appuyant les noirs, créent une atmosphère délicatement cauchemardesque dans laquelle Javier, rongé par la frustration, perd la tête pour la seule femme dont il ne devrait pas s’approcher. Sergio, adoré par les enfants, se relève être un homme profondément détestable et jaloux en dehors des représentations. L’animosité entre les deux hommes, catalysée par Natalia, personnage aux sentiments ambigus, les conduira à devenir de véritables monstres.

Balada Triste présente alors ses premiers signes de faiblesses. Pour son premier film écrit sans l’aide d’autres scénaristes, Alex de la Iglesia écarte peu à peu l’humour et le burlesque qui faisaient tout le charme des premières bobines pour regarder l’aboutissement de la confrontation avec un sérieux déroutant. Profondément marqué par l’histoire de son pays, le réalisateur exploite toujours la toile de fond historique de son récit ; ses clowns maboules et défigurés iront jusqu’à atterrir au beau milieu de l’attentat qui tua Luis Carrero Blanco (successeur probable de Franco). On se demande vraiment quel est l’intérêt d’inscrire la folie destructrice (et vengeresse) de Javier dans ce cadre historique alors que de la Iglesia met en retrait Natalia, personnage clef dont le profil psychologique est tout simplement abandonné. Bien qu’il soit incomparable à une promenade en forêt, Balada Triste se révèle bien moins violent et sulfureux qu’annoncé par son propre créateur. L’excellent segment principal, burlesque et impétueux, rencontre tous les défauts d’un mauvais film de genre dans un final trop théâtral et démesuré.

A la manière du gag récurrent du ghost rider, Balada Triste est un film qui décolle au quart de tour pour redescendre inévitablement sur Terre dans un terrible heurt. Un curieux objet cinématographique.

3 étoiles

 

Balada Triste

Film espagnol, français
Réalisateur : Alex de la Iglesia
Avec : Carlos Areces, Antonio de la Torre, Carolina Bang, Sancho Gracia
Titre original : Balada Triste De La Trompeta
Scénario de : Alex de la Iglesia
Durée : 107 min
Genre : Comédie, Drame, Guerre
Date de sortie en France : 22 juin 2011
Distributeur : SND


Bande Annonce (VOST) :

Article rédigé par Dom

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