Critique : The French Dispatch

Wes Anderson revient au film en prises de vue réelles suite à L’Île aux chiens. Film à sketchs, The French Dispatch est peut-être le long métrage le plus sophistiqué du cinéaste, mais aussi le plus désincarné. Une élégante déception.

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Lorsque Wes Anderson se lance dans la production d’un nouveau long métrage, le casting fait toujours saliver avant le moindre synopsis. The French Dispatch ne déroge pas à la règle puisqu’on y croise la route de Bill Murray, Benicio Del Toro, Léa Seydoux, Adrien Brody, Jeffrey Wright, Timothée Chalamet, Lyna Khoudri ou encore Frances McDormand. Explorant la ville imaginaire d’Ennui-sur-Blasé en guise d’amuse-gueule, le réalisateur a planté ses caméras à Angoulême pour composer sa myriade de tableaux à laquelle il nous a habitué, débauchant par la même occasion pléthore de comédiens francophones, mais pour les réduire à de simples apparitions pour une majorité. Certes, on ne va pas se plaindre de croiser Denis Ménochet, Cécile de France, Félix Moati ou encore Damien Bonnard ici, mais leur présence tient de l’anecdote pure. Toutefois, cela concerne aussi Saoirse Ronan, Elisabeth Moss ou encore Christoph Waltz. Au fond, de nombreux artistes ne servent qu’à agrémenter le décor, à participer à ce vaste manège aux histoires plus ou moins alambiquées par leurs digressions et analepses. L’introduction et la première histoire n’ont pas le temps de donner naissance à des personnages qu’on entre déjà dans un troisième monde. On peut s’émerveiller face à l’esthétique toujours aussi léchée, mais on constate que le maniérisme du réalisateur de The Grand Budapest Hotel l’a poussé sur un sentier où le contexte, le style et l’image sont devenus des absolus, écrasant le reste.

C’est peut-être la partie sur le tueur à l’âme d’artiste qui se révèle la plus intéressante. Déjà, le décor d’une prison limite les cadrages et les personnages, et Benicio Del Toro ainsi que Léa Seydoux impriment quelque chose d’humain qui manque partout ailleurs – alors qu’une histoire relatera d’un kidnapping plus tard. Ce segment narré par Tilda Swinton laissera place à une reconstitution joyeuse de Mai 68 où, à nouveau, la volonté de tisser plusieurs fils narratifs sur un laps de temps court empêche les personnages d’exister. Le choix de mélanger l’anglais et le français, dans les décors et même les dialogues, donne aussi une étrange tonalité, voire un rythme étrangement saccadé sur certains échanges – notamment entre Lyna Khoudri et Frances McDormand. Jouant avec les couleurs, le noir et blanc et même l’animation, Wes Anderson s’amuse tel un enfant lâché dans un immense magasin de jouets avec tout à sa disposition. Si quelques moments prêtent à sourire, lorsque la conclusion arrive, nous avons la désagréable sensation d’avoir parcouru un journal en diagonale et au pas de course. Espérons un peu de retenue et d’épure pour la prochaine aventure, baptisée Asteroid City.

2.5 étoiles

 

The French Dispatch

Film américain, allemand
Réalisateur : Wes Anderson
Avec : Bill Murray, Tilda Swinton, Benicio Del Toro, Léa Seydoux, Adrien Brody, Jeffrey Wright, Timothée Chalamet, Lyna Khoudri, Owen Wilson, Steve Park, Edward Norton, Jason Schwartzman, Mathieu Amalric, Denis Ménochet, Cécile de France, Félix Moati, Damien Bonnard, Saoirse Ronan, Elisabeth Moss, Christoph Waltz
Scénario de : Wes Anderson, Roman Coppola, Jason Schwartzman, Hugo Guinness
Durée : 108 min
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie en France : 27 octobre 2021
Distributeur : The Walt Disney Company France

 

Photos du film Copyright The Walt Disney Company France

Article rédigé par Dom

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Un commentaire

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