Critique : Le Garçon et le héron

Alors qu’il avait annoncé que Le Vent se lève (2013) serait son ultime long métrage, Hayao Miyazaki a pris la décision de livrer une autre œuvre, la véritable dernière, dès 2017. Le Garçon et le héron, inspiré du roman Et vous, comment vivrez-vous ? de Genzaburo Yoshino, aura nécessité de nombreuses années de labeur pour une œuvre foisonnante, pessimiste et profondément testamentaire.

Une page se tourne

Une enfance brisée par la guerre. Une mère décédée dans un incendie et un père absent, travaillant dans l’aviation militaire. Mahito est éloigné de Tokyo en 1942 pour démarrer une nouvelle étape de sa vie dans un lieu reculé du chaos, au milieu d’une nature si paisible, sous la bienveillance d’une troupe de femmes âgées qui ne sont pas sans rappeler Le Voyage de Chihiro (2001), œuvre à laquelle le film se rapportera le plus par ses transformations et ses portes ouvertes sur des univers parallèles. Le Garçon et le héron convoque d’autres œuvres majeures de Miyazaki, les « warawara » ne sont pas sans évoquer les esprits de la forêt de Princesse Mononoké (1997), et la portée écologique du film s’inscrit évidemment dans une filmographie qui aura rarement délaissé la nature et sa destruction.

Mahito et le héron dans Le Garçon et le Héron

Le travail d’animation est toujours époustouflant. La patte « classique » du Studio Ghibli si reconnaissable gagne en force par petites touches, de simples détails de transitions d’une scène à l’autre, comme ces séquences où un personnage va chuter jusqu’à « traverser » l’écran. Pas de recherche de sensation de 3D ici mais bien de proximité avec la caméra et le spectateur. Plus l’on avance dans l’univers dans lequel se plonge Mahito, plus l’on découvre des créatures qui effraient comme elles émerveillent, comme ces perruches bariolées que l’on considère difficilement comme si nuisibles. Au cours de son voyage initiatique, qui pourrait lui permettre de retrouver sa mère, Mahito fait la rencontre d’un patriarche usé, en quête d’un héritier pour veiller sur le monde comme il le fit. Inutile de chercher plus loin que l’image du cinéaste, désolé par la condition actuelle d’un monde sans perspectives réjouissantes.

Le patriarche dans Le Garçon et le Héron

Formellement irréprochable, cet ultime film qui trouve comme moteur l’adolescence, récurrent chez Miyazaki, se montre moins efficace sur le plan émotionnel. Peut-être que cette donnée est liée à ce cheminement et à ce cadre, évoquant des œuvres majeures du cinéaste japonais, mais il y a aussi ce fourmillement et cette densité qui nous écartent souvent des sentiments les plus bruts. Bien que pessimiste, la fantaisie qui se déverse soudain comme un torrent ici manque de nous frapper en plein cœur, hormis cette sensation douce-amère qu’une page de l’animation japonaise se tourne définitivement avec cette aventure labyrinthique.

3.5 étoiles

 

Affiche du film Le Garçon et le Héron

Le Garçon et le héron

Film japonais
Réalisateur : Hayao Miyazaki
Avec les voix de : Soma Santoki, Masaki Suda, Takuya Kimura, Kô Shibasaki
Titre original : Kimitachi wa dô ikiru ka
Scénario de : Hayao Miyazaki
Durée : 124 min
Genre : Animation, Aventure, Drame
Date de sortie en France : 1er novembre 2023
Distributeur : Wild Bunch Distribution

 

Photos du film Copyright Le Studio Ghibli

Article rédigé par Dom

Partagez cet article avec vos amis ou votre communauté :

Twitter Facebook Google Plus

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Comments links could be nofollow free.

 

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Avant de publier un commentaire, vous devez lire et approuver notre politique de confidentialité.