Critique : The Killer

Michael Fassbender réapparaît enfin au cinéma, du moins, sur nos écrans TV puisque The Killer, nouveau film de David Fincher, produit par Netflix, sort uniquement sur la plate-forme en France. Adaptation de la bande dessinée éponyme d’Alexis Nolent et Luc Jacamon, ce thriller dresse le portrait d’un tueur à gages animé par la vengeance. Un film efficace mais mineur dans la filmographie du réalisateur derrière Se7en (1995) ou encore Zodiac (2007).

Pilote automatique

Nous avions perdu de vue Michael Fassbender depuis 2019, dans le triste X-men : Dark Phoenix – loin d’être une purge notamment face aux blockbusters infâmes qui continuent de déferler depuis –, autant dire que cette première collaboration avec David Fincher suscitait un intérêt particulier. Dans la peau d’un tueur à gages dont nous ne connaîtrons jamais la véritable identité, nous le découvrons concentré, méthodique, expliquant en voix off sa vision du monde et ses modus operandi favoris, proches de sa cible alors que pour cette mission parisienne, c’est le fusil de précision qui est requis. Ce premier chapitre, qui n’est pas sans évoquer Fenêtre sur cour (1954) d’Alfred Hitchcock, nous plonge dans un sombre univers dans lequel David Fincher a souvent évolué. La bande originale à nouveau signée par Trent Reznor et Atticus Ross développe un espace tantôt glauque, tantôt mélancolique, que l’on connaît aussi : il s’inscrit dans la lignée de ce qu’ils ont livré sur Millénium – les hommes qui n’aimaient pas les femmes (2011) et Gone Girl (2014). Mais cette fois, les pianos lugubres, drones et atmosphères bruitistes ne surprennent guère, tout comme la trajectoire du film.

Michael Fassbender sur un banc parisien avec son look de touriste allemand dans The Killer

Manquant sa cible, le tueur va regagner son domicile à Saint-Domingue pour découvrir que sa compagne a tout juste évité un assassinat de représailles, non sans blessures. Débute alors une odyssée vindicative, loin d’être déplaisante mais qui donne la sensation d’être en pilotage automatique : hormis son tir raté, The Killer déballe un programme loin d’être sinueux. Dès lors que la traque débute, le film remonte simplement un cours d’eau où les face-à-face mortels sont les seuls instants qui jouent quelque peu avec notre palpitant – palpitant que notre protagoniste surveille consciencieusement à l’aide d’une montre connectée. Les rouages narratifs, grossiers, nous dévoilent des personnages sans envergure. Une donnée qui manque également à notre protagoniste, car hormis le charisme de Fassbender, jouant ici sur son registre le plus flegmatique, il est difficile d’avoir de l’empathie pour lui – empathie qu’il déclare bannir à plusieurs reprises, un des nombreux paradoxes dans sa besace. À ce propos, les aphorismes d’une banalité confondante, martelés en voix off du début à la fin, donnent au film un aspect éculé, comme s’il sortait de la fin des années 90. Car si ce procédé est présent chez Fincher avec son adaptation de Fight Club (1999), la voix qui trotte dans la tête du protagoniste interprété par Edward Norton a une tout autre dimension. Avec son look de touriste allemand (sic) qui écoute The Smiths, le personnage central créé ici est une référence assumée à un autre tueur à gages, campé par Alain Delon dans Le Samouraï (1967) de Jean-Pierre Melville. Un film d’une autre classe !

Tilda Swinton dans The Killer

Froid et cynique, The Killer ne suscite pas de véritable trouble et encore moins de vertige malgré ce job loin d’être ordinaire. Si Fincher possède toujours le même sens de la composition de ses cadres, photographie léchée à l’appui, on trouve des éléments qui jurent avec sa méthodologie habituelle, comme ces quelques plans en caméra épaule qui manquent de maîtrise, ou encore des effets numériques parfois fâcheux, lors d’une bouffée d’adrénaline à scooter dans Paris, dans une automobile à la Nouvelle-Orléans, ou encore des incrustations ratées en arrière-plan (les avions de ligne, par exemple). La sensation d’être face à une œuvre où son perfectionnisme aurait été relégué au second rang est prégnante, et si ce thriller se montre décent, cela nous place loin des standards de la filmographie de David Fincher. Puisque le cinéaste loue la générosité dont fait preuve Netflix, on aurait adoré que le géant Américain lui laisse la possibilité de nous offrir une troisième et ultime saison à la fascinante série Mindhunter (2017-2019), où l’étude de tueurs (en série) suscitait bien plus d’enthousiasme que la psyché de ce contractuel.

3 étoiles

 

Affiche de The Killer de David Fincher

The Killer

Film américain
Réalisateur : David Fincher
Avec : Michael Fassbender, Tilda Swinton, Charles Parnell, Arliss Howard, Kerry O’Malley, Gabriel Polanco, Sala Baker, Sophie Charlotte
Scénario de : Andrew Kevin Walker, d’après une œuvre de d’Alexis Nolent et Luc Jacamon
Durée : 118 min
Genre : Thriller
Date de sortie en France : 10 novembre 2023
Distributeur : Netflix France

 

Photos du film Copyright Netflix

Article rédigé par Dom

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Un commentaire

  1. La photographie était incroyable, mais malheureusement, le scénario ne m’a pas convaincue. Il était plutôt plat et je me suis ennuyée, ce qui est étonnant car d’habitude, j’adore les thrillers.

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