Critique : Mission Impossible – Dead Reckoning Partie 1

Ethan Hunt accepte ses dernières missions : après cinq d’absence à cause de la pandémie, l’ultime volet de la saga Mission Impossible, scindé en deux parties, gagne enfin les salles de cinéma. Christopher McQuarrie reste le réalisateur privilégié par Tom Cruise malgré le décevant opus précédent : le tandem retrouve la bonne formule dans ce pénultième long-métrage, efficace malgré des longueurs, grâce à des séquences d’action prenantes.

Cruise de fond

Ouverture des hostilités sans Ethan : un sous-marin russe de dernière génération se coule avec son propre armement, suite à une manipulation de ses systèmes informatiques par une redoutable Intelligence Artificielle. Ce sera le grand ennemi final de l’agent Ethan Hunt, qui doit toujours agir dans l’ombre avec son équipe, ennemi qui, aujourd’hui, a stoppé la production de films et séries aux Etats-Unis. Lorsque l’adversaire a un tel niveau d’abstraction, de nombreux films échouent à rendre les enjeux tangibles, ou du moins, réalistes – comme dans Die Hard 4 : retour en enfer (2007) par exemple. Ici, il y a une conceptualisation très simple, une clé en deux parties – dont l’utilité reste mystérieuse –, et qui ne doit pas tomber entre de mauvaises mains, car elle permettrait d’interagir avec cette fameuse IA. Luther (Ving Rhames), Benji (Simon Pegg) et Ethan (Tom Cruise) sont sur le coup dans cette mission qui n’abandonne pas Isla Faust (Rebecca Ferguson) ni la Veuve Blanche (Vanessa Kirby). Une certaine gymnastique scénaristique permet de réunir tout ce beau monde en se permettant d’introduire de nouveaux personnages, une voleuse interprétée par Haley Atwell, Grace, et un méchant en chair et en os, Gabriel – Esai Morales, au physique peu convaincant pour le rôle –, et plus convaincante et à son service, une Pom Klementief particulièrement véhémente.

Dans ses grandes lignes, la recette reste inchangée. La mission, cocktail d’infiltration, de bastons, fusillades et courses-poursuites, exige de se surpasser toujours et encore, à mettre sa vie en péril pour une grande cause qui restera ignorée du commun des mortels. Un programme qui se développe évidemment sur plusieurs pays. Tom Cruise assure toujours ses cascades, court probablement plus que dans n’importe quel épisode, et nous offre plusieurs séquences à couper le souffle. Il ne faut pas trop s’attarder sur certains détails scénaristiques – comme une locomotive à vapeur qui continue sa lancée sans être alimentée en charbon ! –, mais la générosité de l’ensemble, réalisé avec un vrai souci de lisibilité de l’action la plupart du temps, donne dans le grand spectacle, le divertissement qui en met plein les mirettes. Là où Mission Impossible – Dead Reckoning Partie 1 montre un aspect suranné, c’est dans son incapacité à faire avancer son récit dans l’action : bien sûr, il serait compliqué d’offrir 2h45 d’action en continu, mais lorsque les personnages sont réunis pour discuter de la suite, McQuarrie met tout le monde à l’arrêt. Tout est sur-expliqué, au risque d’assommer les spectateurs attentifs dans l’unique but de ne pas perdre les plus distraits. Une tare qui, évitée, aurait permis au film d’être encore plus percutant et plus court.

Toujours est-il que, malgré les années qui passent, Tom Cruise, acteur-cascadeur aussi charismatique que producteur méticuleux, montre encore une fois qu’il est au sommet du cinéma d’action contemporain. D’autant plus que dans ce sous-genre impliquant des espions, nous ne connaissons pas l’avenir de la saga James Bond. Alors, après Ethan Hunt, qui nous procurera cette dose d’adrénaline fabuleuse ? Un héros doucement torturé par son passé – avec de nouvelles réminiscences ici, et une densification grâce aux personnages de Hayley Atwell et Pom Klementieff – et un sens de l’action en voie d’extinction, qui minimise les effets numériques tout en proposant un montage intelligible. On aurait pu croire que Fall Out (2018) était l’épisode de trop sur le plan narratif, car l’action se montrait toujours généreuse même si moins efficace dans certaines situations, mais que nenni, il ne s’agissait que d’un simple écart de conduite. Nous n’avons qu’une hâte, c’est de découvrir comment se conclue cette saga. Si la partie 2 était initialement prévue pour l’été 2024, la grève à Hollywood nous demandera peut-être plus de patience, en espérant qu’à la fin, ce ne soit pas l’intelligence artificielle qui l’emporte.

Photos du film Copyright Paramount Pictures