Critique : Past Lives – nos vies d’avant

Premier long-métrage de Celine Song, Past Lives – Nos vies d’avant – encore un titre de film doublé en français pour améliorer son anglais – s’interroge sur le destin de deux êtres séparés à l’adolescence par un déménagement de la Corée du Sud vers les Etats-Unis. Si le film se tient grâce à ses interprètes et ses décors, l’émotion fait défaut et les questions existentielles manquent d’un souffle romanesque.

Différentes rives

On ne listera pas tous ces films qui séparent deux amants, voire deux amants en devenir, à cause du travail, de la guerre ou des aléas du destin, mais c’est dans cette séparation de deux êtres attachés l’un à l’autre que Celine Song développe son premier film. Elle-même émigrée de sa Corée du Sud natale, la cinéaste est à même de montrer les différences culturelles avec les États-Unis, élément qui est peut-être le plus marquant dans ce film et non ce qui ne s’est jamais accompli entre Nora (Greta Lee) et Hae Sung (Yoo Teo). Se déroulant sur trois époques, chacune séparée par douze années, le film se prive d’un élément clé dans sa première partie, alors que les protagonistes n’ont que douze ans : si on voit bien qu’ils sont attachés l’un à l’autre, il manque des éléments tangibles pour croire qu’ils auraient pu un jour, devenir un couple. Car tout le film s’oriente sur leur séparation sans nous faire ressentir de manque : des retrouvailles grâce à internet, mais chacun mène sa vie, pour elle dans un cadre artistique et pour lui, dans des entreprises où les employés ne comptent pas les heures de dur labeur.

Déployant une belle philosophie de vie, notamment grâce à la lucidité de Nora, Past Lives ne suscite guère de trouble, si ce n’est du côté de l’époux de Nora. Lorsque Hae Sung débarque à New York après un si long silence – qui rend l’ensemble encore plus froid sur le plan sentimental –, le film amuse sur la position délicate du mari, qui aime aussi la culture coréenne. Mais aucun doute ne vient s’infiltrer dans la mécanique de ce film romantique un peu trop calculé, sans fougue, mais dont on apprécie la mise en scène sans esbroufe tout comme les interprètes convaincants. Enfonçant des portes ouvertes sur les choix qui construisent la vie de tout un chacun, ce premier long-métrage peine à toucher une corde sensible même lors de son ultime scène. S’il fonctionne sur un autre principe et avec une temporalité vertigineuse, liée à la réalité du temps qui s’écoule, on ne pourrait que recommander de revoir la trilogie des Before réalisé par Richard Linklater avec Julie Delpy et Ethan Hawke.

Merci à Allocine pour la découverte du film en avant-première.

Photos du film Copyright Jon Pack