[Critique] Shadow Dancer (James Marsh)

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James Marsh (réalisateur du documentaire Le Funambule) met le cap sur Belfast et les activistes de l’IRA. Un thriller terroriste intéressant, qui souffre d’un manque d’arguments artistiques malgré ses très bons acteurs.

Vendetta éternelle

Enfant, Colette McVeigh a vu son frère mourir en 1973, touché par balle lors d’une rixe entre l’IRA, mouvement indépendantiste de l’Irlande du Nord, et l’armée britannique. Vingt ans après, embrigadée dans les actions terroristes de l’IRA, la voilà prête à déposer une bombe dans le métro londonien. Le moment venu, le courage lui manque, l’attentat est déjoué et là voilà nez à nez avec les services secrets britanniques lui proposant un marché : devenir une informatrice pour le MI5 ou être jugée et perdre la garde de son fils. Shadow Dancer, c’est le destin d’une femme écrasée par le terrible étau de la lutte antiterroriste. Collaborer avec les services secrets britanniques, c’est trahir les siens, son frère Connor étant un membre très actif du mouvement, et s’exposer au danger mortel d’être démasquée par les têtes de l’IRA. L’alternative, impliquant la perte de son fils, ne s’envisage même pas. Cet état terrible de tiraillement envahit le film grâce à la performance d’Andrea Riseborough, d’une sensibilité remarquable. En face, sur l’autre rive, un froid mais très humain Clive Owen la chaperonne et la protège de son mieux, lui même en prise à des conflits avec sa hiérarchie – où l’on trouve la trop rare sur grand écran Gillian Anderson.

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Malgré ce solide récit de lutte antiterroriste, abordée d’un point de vue très particulier, celui d’une femme dont l’engagement tient avant tout de la vengeance et non d’une conviction politique, Shadow Dancer manque de s’élever artistiquement. La photographie de Rob Hardy, d’un gris glacial faisant ressortir l’imperméable écarlate de Colette comme une plaie béante, se montre relativement bâclée. La forte présence de bruit numérique dans les noirs – un problème de transfert ? Le film étant tourné en 35 mm avant d’être converti en numérique – et un manque d’unité dans l’éclairage de certaines scènes en font un film peu attrayant sur le plan visuel. Des faiblesses esthétiques appuyées par les lacunes d’une mise en scène fainéante, qui n’offre aucune distance entre le spectateur et l’héroïne – on peut retranscrire l’étouffement de la protagoniste sans refermer le cadre sur elle. Reposant principalement sur des plans en caméra épaule, la mise en scène de Marsh trouve un intérêt lors de certaines séquences en extérieur, comme lors d’une saisissante tentative d’assassinat ou des funérailles d’un membre de l’IRA : là est traduit l’urgence, le danger, le réalisme. Mais Shadow Dancer ne s’effondre jamais, grâce à son diffus suspense, dévoilant sa véritable noirceur dans un final surprenant. Alimenté par d’obscures manipulations et stratégies avilissantes, l’affrontement semble sans issue. Alors qu’il aurait pu rejoindre les très grands films centrés sur l’IRA, comme Au nom du père de Jim Sheridan et Hunger de Steve McQueen, Shadow Dancer se présente comme un thriller modeste et intrigant, au véritable potentiel galvaudé.

3 étoiles

 

Shadow Dancer

shadow-dancer-afficheFilm irlandais, britannique, français
Réalisateur : James Marsh
Avec : Andrea Riseborough, Clive Owen, Gillian Anderson, Aidan Gillen, Domhnall Gleeson, David Wilmot
Scénario de : Tom Bradby
Durée : 101 min
Genre : Thriller
Date de sortie en France : 6 février 2013
Distributeur : Wild Bunch Distribution


Bande Annonce (VOST) :

Article rédigé par Dom

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3 commentaires

  1. Beaucoup aimé, un thriller diablement efficace qui délaisse l’intrigue pour l’humain avec une fin qui ne déçoit pas… 3/4

  2. La fin du film, est vraiment…, non je ne dirais rien , ce film est a voir, puis les acteurs sont remarquable, tout simplement ce film sera gravé dans ma mémoire.

  3. Moui, pas convaincu. Bien mis en scène, bien interprété, Shadow Dancer n’en reste pas moins un thriller anecdotique, la faute à une intrigue décevante et à une fin maladroite. La révélation du film, c’est Andrea Riseborough, qui interprète un personnage solide et fragile comme une toile d’araignée. Ma critique : http://tedsifflera3fois.com/2013/04/01/shadow-dancer-critique/

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