Critique : Valérian et la cité des mille planètes

Avec son budget dépassant les 175 millions d’euros, Valérian et la cité des mille planètes est le plus gros projet de science-fiction jamais réalisé en France et même en Europe. Un pari audacieux pour Luc Besson, qui nous offre un long métrage parfois fabuleux par son univers mais qui finit par décevoir par ses imposantes faiblesses narratives.

Splendeur et inconsistance

N’ayant jamais lu le moindre tome de la saga Valérian et Laureline de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières, c’est en pur néophyte que j’ai plongé dans cette adaptation de Luc Besson, dont le titre élimine le prénom de l’héroïne… Peut-être pour nous rappeler que Laureline sera surtout celle qui seconde Valérian, en plus de représenter l’objet du désir ?
La cité des milles planètes, sa naissance et son évolution, sert d’ouverture au film sous fond de Space Oddity de David Bowie. Déjà, des dizaines d’extraterrestres aux traits singuliers sont aperçus avant de gagner la planète Mül, où un peuple de créatures filiformes vit paisiblement dans un cadre paradisiaque, étendues de plages de sable fin bordant les mers immaculées d’une autre galaxie. D’emblée, Luc Besson exploite parfaitement la 3D et plonge le spectateur au cœur d’un univers original et fantastique : certes, on pourrait rapprocher le peuple des Pearls aux Na’vis d’Avatar, mais l’ambition est là, resplendissante. Cette séquence sur Mül, qui s’achève par la destruction de la planète, n’était qu’un rêve de Valérian (Dane Dehaan), agent spatio-temporel qui en pince pour sa coéquipière Laureline (Cara Delevingne), repoussant toujours les avances du jeune homme. Mais le cauchemar de Valérian n’est pas anodin, il trouvera même un lien dans leur nouvel mission, celle de récupérer un objet convoité dans les bas-fonds du Big Market, un marché gigantesque au milieu du désert, accessible au travers d’une deuxième dimension, dans laquelle on pénètre grâce à un casque similaire aux casques VR. Cette séquence d’exploration et d’action merveilleuse est l’ultime tour de force de Valérian et la cité des mille planètes qui exposera cruellement toutes ses faiblesses et incohérences scénaristiques dans une seconde partie poussive, en manque d’idées fraîches pour assurer le spectacle jusqu’au rideau final.

C’est de retour à la cité des mille planètes que le film subit un violent phénomène de décélération : jusqu’alors brillant de créativité et rythmé, ouvrant sur de multiples pistes avec ses mystères, le nouveau projet de Besson s’étire sans éclat avec des enjeux écologiques traités maladroitement. Alors que la radioactivité menace le cœur de la station accueillant des milliers de populations collaborant ensemble – sous quel principe ? Nous ne le saurons jamais –, Valérian et Laureline vont se retrouver séparés au cours de leur enquête. Quand l’un se retrouve en danger, l’autre vient à sa rescousse, et inversement. De ces aventures digressives, où les apparitions se suivent sans marquer le film (Ethan Hawk, Alain Chabat, Rihanna), procèdent un maigre plaisir. D’une part, le décrochement avec le récit est total, d’autre part, la créativité initiale s’est évanouie au profit de séquences qui tiennent plus de l’hommage dans des espaces plus convenus, rappelant parfois des moments malheureux de la prélogie Star Wars. L’apparition de Rihanna dans le personnage polymorphe de Bubble permet d’assister à un spectacle surprenant, mêlant la danse aux dernières prouesses technologiques, mais jamais on ne s’attache à ce personnage « phare » par la star qui l’incarne, et qui sortira du récit de façon balourde. On a plus la sensation d’assister à un placement de produit qu’au passage d’une artiste pour nourrir une autre œuvre.

Grâce à certains traits d’humour, un trio de personnages espiègles toujours dans les parages pour aider contre une récompense, Valérian et la cité des mille planètes conserve une certaine bonhomie jusqu’à son ultime partie bâclée, révélant les causes du sort de la planète Mül. Luc Besson se vautre dans une séquence de bataille spatiale qui oublie de définir les camps pour le spectateur, le laissant pantois face à un triste feu d’artifice numérique. De même qu’une confrontation à main armée avec des robots de combat ne procure aucun plaisir à cause de la fainéantise du découpage et de la mise en scène. Au rayon des lourdeurs aberrantes, l’explication du film par le piètre méchant de cette épopée dans un dialogue plombant – et destiné à quelle partie du public ? Même les plus jeunes n’ont pas besoin de cela. Sans briller outre mesure, le duo Delevingne/DeHaan aura rempli sa mission, mais au final, pouvait-on vraiment attendre un film de science-fiction révolutionnaire de la part de Luc Besson ? Les amateurs de la BD originelle peuvent-ils trouver satisfaction face à ce spectacle bancal ? Il est certain que Luc Besson se montre là bien plus séduisant qu’avec Lucy, mais le cinéaste reste si loin des œuvres majeures de sa filmographie. La fabuleuse créativité initiale n’étant qu’un écran de fumée pour cacher un manque d’ambition narrative désespérant à cette échelle, Valérian et la cité des mille planètes se place en petit divertissement de science-fiction paradoxal, fruit de moyens colossaux au service d’un récit chétif et déjà-vu.

3 étoiles

Un grand merci à BNP Paribas pour l’avant-première du film et la soirée suivant la projection, avec une belle exploration de l’espace MK2 VR du MK2 Bibliothèque où l’on peut notamment devenir, l’espace de quelques instants, un oiseau au cœur d’une métropole américaine avec Birdly – une sacrée expérience !

 

Valerian et la cité des mille planètes

Film français
Réalisateur : Luc Besson
Avec : Dane DeHaan, Cara Delevingne, Clive Owen, Rihanna, Ethan Hawk, Alain Chabat, Herbie Hancock
Scénario de : Luc Besson, d’après une bande dessinées de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières
Durée : 137 min
Genre : Science-fiction, Action, Aventure
Date de sortie en France : 26 juillet 2017
Distributeur : EuropaCorp

Bande Annonce (VOST) :

Article rédigé par Dom

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