Critique : Blindspotting

Premier long métrage de Carlos López Estrada, Blindspotting tient de ses petites claques que l’on ne voit pas venir. Deux potes, un même job, et énormément de tension dans la ville d’Oakland, Californie.

Oakland conditionnelle

On trouve énormément d’humour dans cette comédie dramatique, mais surtout, une tension diffuse de la première à la dernière séquence du film. On découvre Collin (Daveed Riggs) alors qu’il sort de prison pour un an de liberté conditionnelle, et le moindre écart le conduirait illico derrière les barreaux. Un type en apparence sympathique, dont on ne connaît pas le motif de l’emprisonnement, et que l’on suit à trois jours de la fin de sa conditionnelle : accompagné par son pote d’enfance Miles (Rafael Casal), le voilà à l’arrière d’un étrange véhicule uber enfumé et rempli d’armes à feu ! Miles, c’est ce bon pote qui la joue gangster, le genre à déclencher une bagarre pour rien, pour un regard ou un mauvais mot. Une bombe à retardement scotchée à Collin, Miles bossant dans la même équipe de déménageurs que lui. Oh, précision : Collin est afro-américain dans une ville où le racisme et la violence policière marchent main dans la main. Un soir, alors qu’il ramène le camion, il voit un policier abattre froidement un homme noir qui fuyait. En retard pour son couvre-feu et poussé par les flics à circuler, Collin trace mais sent qu’il n’a pas fait ce qui devait être fait, laissant une bavure policière endeuiller une nouvelle famille. Désormais, ce sera un cauchemar qui lui collera aux basques.

Ecrit par ses deux interprètes, Diggs et Casal, Blindspotting voit son scénario traîner depuis plus de 15 ans. Est-ce que ce sont des films tels que Detroit qui ont permis son passage du papier vers le grand écran ? Peu importe, le film de Carlos López Estrada offre une expérience remarquable en terme de malaise, celui de pouvoir être victime d’un abus des forces de l’ordre à tout instant, du simple fait de ne pas avoir la peau blanche. Avec une arme dans les mains de Miles, pour se défendre, de nombreuses rencontres qui pourraient tourner au débordement, on craint le pire, presque dans chaque scène. Et pourtant, il y a cette légèreté, cet humour, ce regard amusé (ou désabusé) sur la gentrification d’Oakland, car c’est aussi le portrait de cette ville rarement représentée, qui se déploie d’ailleurs en splitscreen en guise d’introduction. Si Collin a commis une faute, c’est un jeune homme qui aimerait retrouver une vie normale. La prison lui a fait perdre sa copine, Val (Janina Gavankar), et désormais, il relativise son amitié avec Miles, père de famille qui flirte avec l’irresponsabilité.

Avec sa mise en scène dynamique, Blindspotting porte avec lui tout un rythme donné par ses protagonistes, parfaitement campés. Les deux potes aiment rapper, en toute situation, et cette amitié réelle, qui dépasse le film, donne un éclat particulier à cette œuvre à la fois cool et dure, par le cœur de son récit, ces problématiques sociétales qui perdurent. Une belle chronique, avec ce qu’il faut de perspicacité, d’amertume mais aussi, dans sa violence, l’espoir qu’un changement positif est possible.

3.5 étoiles

 

Blindspotting

Film américain
Réalisateur : Carlos López Estrada
Avec : Daveed Diggs, Rafael Casal, Janina Gavankar, Jasmine Cephas Jones
Scénario de : Daveed Diggs et Rafael Casal
Durée : 95 min
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie en France : 3 octobre 2018
Distributeur : Metropolitan FilmExport

 

Article rédigé par Dom

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