Critique : Fumer fait tousser

Second long métrage de l’année 2022 pour Quentin Dupieux, Fumer fait tousser, présenté en séance de minuit à Cannes, joue sur le territoire de l’absurde avec un zeste de gore. Ni brillante, ni plombante, cette comédie s’apparentant à un film à sketches se positionne comme une nouvelle pastille plutôt agréable.

Force absurde

On pourrait croire que Dupieux nous joue une parodie des Bioman lorsque l’on découvre, au travers des jumelles d’un adolescent, les Tabac Force affronter une tortue mutante. Des tenues de l’équipe à leur style de combat face à un méchant costumé, tout rappelle la série japonaise des années 80, jusqu’à la destruction du monstre dans un geyser de sang délirant ! Mais la troupe de justiciers, où l’on trouve Gilles Lellouche, Anaïs Demoustier, Vincent Lacoste, Oulaya Amamra et Jean-Pascal Zadi va être invitée à faire une pause par leur chef, un rat baveux campé par un Alain Chabat devenu marionnettiste. Si tous ces comédiens apportent leur charisme, tous sont interchangeables tant les personnages sont si peu développés – tout comme ceux constituant les différents segments. Car dans leur retraite, alors que plane la menace d’un certain Lezardin (Benoït Poelvoorde), les Tabac Force vont tuer le temps en se racontant d’étranges histoires.

Comme souvent dans le cinéma de Quentin Dupieux, on trouve quelques trouvailles merveilleuses, comme de nombreux moments de flottement. Bien que l’on puisse tout accepter ou pardonner au nom de l’absurde, le film dégage un certain manque de maturité, et la photographie peu travaillée du Français commence à lasser la rétine. Plusieurs éléments montrent que le film aurait pu jouer sur une autre dynamique, donner plus d’envergure aux Tabac Force et à leur mission, d’autant plus qu’il ne dure que 80 minutes – autre marque de fabrique de l’auteur. Toutefois, il y a un vrai plaisir à plonger dans les histoires, avec probablement comme point culminant, celle mettant en scène un accident avec une machine agricole avec Blanche Gardin, Anthony Sonigo et Raphaël Quenard. Il y a même ici un niveau de délire qui prouve que le cinéaste pourrait livrer une merveille du genre avec une écriture plus fine. Ainsi, ce film semble toujours s’adresser aux inconditionnels de la méthode Dupieux, ce cinéma bricolé, libre et sans prétention, au casting hautement séduisant, mais ne menant à rien de renversant. Les autres spectateurs pourraient connaître autant de plaisir que de frustration face à un projet encore plus atypique que des films comme Incroyable mais vrai (2022) ou Mandibules (2020), mais paradoxalement, plus savoureux grâce à sa structure permettant de naviguer d’un fait loufoque à l’autre en toute simplicité.

Photos du film Copyright 2022 – CHI-FOU-MI PRODUCTIONS – GAUMONT