Critique : Viendra le feu

Avec son troisième long métrage, Viendra le feu, Oliver Laxe est récompensé du Prix du jury Un Certain Regard lors du Festival de Cannes 2019. Une exploration d’une communauté simple et proche de la nature en Galice, rattrapée par les maux du monde moderne et ses flammes.

Péril en la montagne

Le sublime et l’effroyable s’entremêlent dans les premiers plans de Viendra le feu : de nuit, des eucalyptus d’une taille spectaculaire sont abattus par un engin de chantier. La beauté picturale, amplifiée par la musique, se retrouve contrastée par cette destruction, ces arbres qu’on entendrait presque pleurer dans leur chute. Et pourtant, nous, profanes en matière de protection des forêts, ne pouvons rien affirmer face à cette scène impressionnante. Des feuilles d’eucalyptus à des feuilles administratives, un prisonnier retrouve la liberté : Amador Coro (Amador Arias) sort d’un séjour de deux ans derrière les barreaux pour pyromanie, un acte ayant causé des ravages considérables. Oliver Laxe va s’accrocher à la simplicité du retour à la liberté de ce personnage pour lequel on essaie de déceler un penchant pour le feu, des signes de troubles mentaux : voilà seulement un homme qui semble brisé, discret mais au service de sa communauté, chétif malgré sa grande taille. Loin du profil archétypal du pyromane. Amador retrouve la ferme de sa mère, l’aide au travail à effectuer avec les vaches, regagnant des terres où personne ne semble montrer d’animosité à son égard : il y aura une blague sur un briquet, rien d’autre. Les sollicitations pour renouer des liens avec les autres, Amador les évite, comme s’il devait expier d’autres péchés ou s’infliger une pénitence supplémentaire par la solitude.

Avec un regard serein sur ces terres, ces gens, Oliver Laxe compose une fiction aux frontières de la réalité, masquant ses enjeux profonds au détour de quelques conversations. Viendra le feu montre au-delà du doute et de la culpabilité un monde en profondes mutations, des mutations dont les racines peuvent être ignorées lorsqu’il est si facile de désigner un bouc émissaire. L’ultime et court acte du film se déroule lors d’un incendie violent – des feux réels, captés en équipe réduite au plus près des interventions des pompiers. Dans cette situation de grand péril pour une partie du village, Amador est abandonné pour suivre le travail périlleux des pompiers, dont certaines décisions et actions peuvent aller à l’encontre des effets recherchés. Dans la colère et la fatigue du lendemain, des questions restent en suspens et nous quittons déjà cet univers luxuriant, marqué par les paradoxes. S’il manque peut-être la volonté d’appuyer fermement un propos, Viendra le feu nous offre une expérience cinématographique réussie et souvent fascinante.

3.5 étoiles

Le DVD du film propose deux pistes VO en Dolby Digital, 5.1 et stéréo. Du côté de la section bonus, une interview de 26 minutes du réalisateur Oliver Laxe, avec plusieurs bandes annonces.

 

Viendra le feu

Film espagnol, français, luxembourgeois
Réalisateur : Oliver Laxe
Avec : Amador Arias, Benedicta Sánchez, Inazio Abrao
Titre original : O que arde
Scénario de : Oliver Laxe
Durée : 85 min
Genre : Drame
Date de sortie en France : 4 septembre 2019
Disponible en DVD depuis le 4 février 2020
Distributeur : Pyramide Distribution

 

Article rédigé par Dom

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