Critique : Ça Chapitre 2

Suite au succès du premier remake de Ça en 2017, un film d’honneur relativement honnête mais incapable de maîtriser ses effets, Andy Muschietti rempile pour la suite et fin d’une durée exceptionnelle et qui ne peut plus compter sur la bonhomie de ses adolescents. Ça
: Chapitre 2
tient du train fantôme détraqué, interminable et désolant.

Rouge sans

2019 ou l’année des excès, des durées aberrantes pour des œuvres qui n’ont pas grand chose à raconter ou du moins, qui ne savent pas comment les raconter. Après l’insipide Avengers : Endgame, le nouveau monstre boursouflé à gagner les salles s’appelle Ça : Chapitre 2 avec sa durée record pour le genre de deux heures et quarante-neuf minutes. La morale : l’union fait la force, mais même lorsque l’on arrive à vaincre ses peurs, on reste une bande de losers – en quoi, d’ailleurs, tous les personnages ayant une situation professionnelle plus que correcte ? Cette nouvelle adaptation de Stephen King – qui pique une tête dans ce carnage dans le rôle d’un antiquaire – dont le scénario est signé Gary Dauberman (Ça, Annabelle) –, ne sait pas aller à l’essentiel, ni générer de l’émotion et se montre encore moins capable de se détacher des sentiers battus. Si l’on ajoute à cela un réalisateur sans aucune retenue en matière d’effets spéciaux et horrifiques, on obtient une substance fondamentalement indigeste, d’autant plus que la bande originale de Benjamin Wallfisch rajoute une louche au triste tableau, avec son chaos instrumental sans queue ni tête. Pourtant le film donne l’allure générale d’une œuvre où tout le monde s’est appliqué à la tâche, et il est certain qu’il serait moins insupportable avec une durée plus adaptée à ses tenants et aboutissants. 2016, soit 27 ans après les événements tragiques survenus à Derry, le clown meurtrier (Bill Skarsgård) refait surface en arrachant le cœur d’un jeune homosexuel interprété par Xavier Dolan, auparavant tabassé par une bande d’abrutis, mais tout cela n’a aucune importance dans ce récit – au-delà de l’élément déclencheur – qui fonctionne en vase clos, resserré sur ses six personnages principaux évoluant dans un monde véritablement sans vie, hormis pour présenter des victimes collatérales.

La troupe se compose de Jessica Chastain, James McAvoy, Bill Hader, Isaiah Mustafa, Jay Ryan et James Ransone. Si les trois premiers arrivent à donner vie à leurs personnages, les trois autres se montre terriblement ternes et fades – allez, sauvons Isaiah Mustafa qui se trouve dans une zone entre les deux catégories. Les (trop) nombreuses analepses avec les adolescents permettent même de saisir ce problème en matière de charisme, rendant ce film encore plus laborieux. Il faut déjà réunir la bande à Derry, et les convaincre d’affronter à nouveau leur terreur du passé, à revivre leurs traumas personnels cristallisés autour du monstrueux clown dévoreur d’enfants. Ainsi, de façon particulièrement programmatique, Andy Muschietti accompagne chaque personnage sur les traces d’un passé sans envergure, sans profondeur dramatique. D’une part il y a un aspect terriblement désuet à situer l’intrigue proche de nos jours, d’autre part le cinéaste argentin n’a aucune utilisation réfléchie des effets spéciaux. Lorsqu’une vieille femme numérique saute sur Beverly (Jessica Chastain), il est impossible de ressentir le moindre frisson. Le surgissement est aussi attendu que les effets numériques se montrent inaboutis, trop artificiels pour prendre corps. Plus tard dans le film, une tête décapitée prendra vie à la façon d’une araignée, non sans rappeler un phénomène horrible dans The Thing de John Carpenter : ici encore, le numérique est employé de façon catastrophique, confinant à la série B télévisuelle quand en 1982, les animatroniques conçus pour le film de Big John marquent l’esprit des spectateurs pour toujours. Et la liste des doléances s’étend aussi sur le placement de la caméra, le découpage, … Atrocement répétitif dans son exploration du passé individuel et collectif des personnages, Ça : Chapitre 2 conduit naturellement vers une grande confrontation finale qui tourne à la guignolade démesurée – bien que les effets numériques y trouvent une plus grande force.

Tombant dans le piège de ces films d’horreur contemporains singeant le parcours et les effets d’un train fantôme de fête foraine – lieu visité par deux fois dans le film –, Ça
: Chapitre 2
ne parvient jamais à installer une atmosphère oppressante, ni même à trouver le malaise dans ses séquences d’horreur sans âme, artificielles. Portant le sceau de la vacuité dominante de l’époque, le rouge sang du ballon n’est plus qu’un « rouge sans » : sans saveur, sans subtilité, sans intérêt.

1.5 étoiles

 

Ça : Chapitre 2

Film américain
Réalisateur : Andy Muschietti
Avec : Jessica Chastain, James McAvoy, Bill Hader, Isaiah Mustafa, Jay Ryan, James Ransone, Bill Skarsgård, Xavier Dolan, Stephen King, Peter Bogdanovich
Titre original : It Chapter Two
Scénario de : Gary Dauberman, d’après des romans de Stephen King
Durée : 269 min
Genre : Epouvante, Horreur, Drame
Date de sortie en France : 11 septembre 2019
Distributeur : Warner Bros. France

 

Article rédigé par Dom

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