Critique : It Comes at Night

Deuxième long métrage de Trey Edward Shults, It Comes at Night nous plonge dans un univers horrifique aux nombreuses qualités, à commencer par un récit concentré sur la cellule familiale pour une œuvre qui ose et maîtrise la suggestion, le hors-champ, à l’heure des jump scare à gogo et des créatures omniprésentes. Promenons-nous dans les bois, pendant que la menace n’y est pas.

Angoisse noctambule

Dans une vaste demeure au milieu de la forêt, une famille survit barricadée, se protégeant d’un mal qui sembler changer les êtres humains en créatures semblables à des zombies. Vu comment se protège Paul (Joel Edgerton) alors qu’il doit éliminer son beau-père Bud (David Pendleton), contaminé, face à sa femme Sara (Carmen Ejogo) et leur fils Travis (Kelvin Harrison Jr.), la maladie pourrait se transmettre par simple contact physique ou encore par l’air. Mais au fond, ces mesures sont-elles réellement efficaces ? Paranoïa ou non, le spectateur est mis sous pression dans une ambiance morose qui sent la fin des temps dans un milieu reculé des villes – et qui paraît à priori tout à fait normal en plein jour. Mais qu’est-ce qui rode la nuit, qu’elle est cette menace indéfinie que nous indique le titre du film ? Le vacarme nocturne dans le vestibule n’est en tout cas pas de son ressort une nuit où Paul, Sarah et Travis se seront équipés pour affronter le pire : c’est un pilleur à la recherche de nourriture et d’un abri, Will (Christopher Abbott). Un homme qui, lui aussi, veut sauver et protéger les siens, une femme, Kim (Riley Keough), et un enfant, Andrew (Griffin Robert Faulkner), laissés à plusieurs kilomètres de là. Il sera décidé des les accueillir après avoir vérifié qu’aucune de ces trois personnes ne soit infectée. Alors que Trey Edward Shults continue à cultiver son atmosphère oppressante, au travers de plans soignés, notamment ces plans de déambulation nocturne dans la maison – dérivée de l’exploration de la maison hantée, mais ici, le foyer doit se préserver de tout agent extérieur, anormal –, cette possibilité d’une communauté à deux familles ouvre sur une certaine forme d’espoir. A tort.

C’est finalement une peur primaire qui est exploitée dans ce film, peur primaire amplifiée par le cadre horrifique : celle de l’étranger pénétrant par effraction dans le foyer familial. It Comes at Night nous confronte alors à plusieurs problématiques. En sous-texte, à quoi bon vivre dans un monde qui semble perdu ? L’espoir que le cours de la vie pourrait reprendre un beau jour ? Mais en premier lieu, jusqu’où peut-on aller pour protéger les siens, jusqu’où peut-on aller à l’encontre de son prochain dans l’unique but de protéger sa famille d’un danger supposé ? Car l’entente va dérailler suite à un événement fâcheux, survenant à nouveau en pleine nuit, découvert par Travis, au sommeil léger. Un personnage d’adolescent fascinant, dont émane une bienveillance forte et suscitant l’empathie par sa trajectoire fondamentalement tragique : ce grand-père abattu et brûlé sous son regard, son compagnon à quatre pattes qui s’évanouira dans les profondeurs d’une forêt lugubre, ce désir sexuel qu’il ne peut assouvir avec Kim… Et ces cauchemars, séquences parfois effroyables par leur imagerie horrifique et une musique saisissante. It Comes at Night tient plus souvent du drame post-apocalyptique (en milieu forestier) que du véritable film d’horreur comme on l’entend aujourd’hui, mais c’est en parcourant la frontière entre ces deux mondes que le réalisateur américain parvient à garder le spectateur tendu, à nous plonger dans l’obscurité absolue, celle où l’homme est capable du meilleur comme du pire à l’aube de son extinction. Il manque peut-être un coup d’éclat final pour être totalement marqué par cette œuvre pesante et désespérée, mais le cauchemar a suffisamment pris racine en nous pour nous troubler au-delà du générique de cette sinistre et angoissante chronique.

3.5 étoiles

 

It Comes at Night

Film américain
Réalisateur : Trey Edward Shults
Avec : Joel Edgerton, Kelvin Harrison Jr., Carmen Ejogo, Christopher Abbott, Riley Keough, Griffin Robert Faulkner
Scénario de : Trey Edward Shults
Durée : 91 min
Genre : Horreur, Thriller
Date de sortie en France : 21 juin 2017
Distributeur : Mars Films

Bande Annonce (VOST) :

Article rédigé par Dom

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