Critique : Green Room

Le troisième long métrage de l’américain Jeremy Saulnier, remarqué lors de son passage à la Quinzaine des réalisateurs, s’inscrit dans le registre du survival brutal et sans concession. Dans Green Room, un groupe de punk rock se retrouve confronté à une bande de brutes néo-nazis dans leur bastion. Un affrontement sanguinaire et saisissant.

La Fureur de survivre

Il y a des genres qui peuvent se débarrasser d’énormément de bagages dramaturgiques, de simplifier au maximum la relation entre des personnages qui n’ont besoin, au final, que du charisme des comédiens pour prendre vie. Le survival est un sous-genre qui, maîtrisé, peut reposer entièrement sur sa mise en scène et son rythme, et l’habile Jeremy Saulnier l’a bien compris. Si Blue Ruin, son précédent film, travaillait au cœur de la cellule familiale, avec toute la palette d’émotion que cela implique, Green Room ne présente qu’un petit groupe de punk rock bien rodé au spectateur, et son quatuor, composé d’Anton Yelchin (Pat), Alia Shawkat (Sam), Joe Cole (Reece) et Callum Turner (Tiger) fonctionne à merveille. Dès les premières minutes du film, la cohésion est là, on ressent de l’authenticité face à ces jeunes dans un van, écumant les petites salles et bars pour une poignée de dollars. Une poignée de dollars qui leur permet de s’exprimer au travers de leur musique enragée. Alors qu’une date est annulée, un arrangement est trouvé pour jouer un soir de plus dans un rade un peu particulier, repère de skinheads qui n’ont pas seulement des soucis de calvitie mais un penchant véritable pour les idées bien à droite, au bon souvenir d’un certain troisième Reich. Pas de quoi les impressionner puisque c’est sans vergogne qu’ils débutent leur set sur un endiablé Nazis punks, reprise du groupe The Dead Kennedys. Si les bouteilles et crachats fondent sur la scène, le public est emporté par les riffs puissants dans un pogo filmé hors du temps, suspension qui retient les derniers instants de sécurité des musiciens, comme un rêve éveillé avant l’enfer. En backstage, Pat va ouvrir la mauvaise porte au mauvais moment, trouvant une jeune femme tout juste assassinée par une brute peu commode, et ce, sous les yeux de son amie Amber (Imogen Poots). Dès lors, la tension monte et les chances de sortir indemnes s’amenuisent à chaque minute.

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Face à ce meurtre non prémédité, les deux groupes sont poussés vers une confrontation où la fébrilité et le manque de lucidité s’emparent de tout un chacun. D’un côté, les musiciens promettent le silence si leur sortie est assurée sous la surveillance de la police ; de l’autre, les dirigeants de la salle se creusent les méninges pour éviter la présence des forces de l’ordre sans compromettre le silence absolu sur les événements. Enfermé dans une salle avec un homme de main armé dans l’attente des ordres du grand patron, Darcy (Patrick Stewart), le groupe de rock se voit exhorté par Amber à user de la violence pour avoir une chance de déguerpir sur leurs deux jambes. Incroyable est la tension que parvient à bâtir Jeremy Saulnier dans ce cadre qui était déjà pesant avant l’incident, face à des mines patibulaires arborant des symboles nazis. Son sens du montage et du placement de la caméra ménagent un suspense étouffant, seulement percé par les accès de barbarie qui éclatent au détour d’une action d’un des deux camps. Viscéral et doté d’un sacré sens de la répartie, Green Room se focalise sur l’instinct de survie avec des comédiens épatants : la nervosité contagieuse d’Anton Yelchin, l’ardeur avantageuse de Joe Cole, l’ambiguïté fiévreuse d’Imogen Poots, la placidité implacable de Patrick Stewart, … Autant de visages qui marquent par leur désespoir ou leur cruauté jusqu’à atteindre un stade bestial, tribal. Au terme du carnage jaillit une touche de cynisme : on pourrait alors se prêter au jeu de revoir toute la situation, avec plus de lucidité. Mais les larsens ont cessé et le sang a déjà coulé.

4 étoiles

 

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Green Room

Film américain
Réalisateur : Jeremy Saulnier
Avec : Anton Yelchin, Imogen Poots, Patrick Stewart, Alia Shawkat, Joe Cole, Callum Turner, Macon Blair
Scénario de :
Durée : 96 mn
Genre : Thriller, Action
Date de sortie en France : 27 avril 2016
Distributeur : The Jokers / Bac Films

Bande Annonce (VOST) :

Article rédigé par Dom

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