[Critique] La Crème de la crème, réalisé par Kim Chapiron

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Toujours porté sur la jeunesse, Kim Chapiron revient en France après l’univers correctionnel de Dog Pound. Dans La Crème de la crème, trois étudiants d’une prestigieuse école de commerce mêlent business et sexe dans une comédie dramatique séduisante bien que trop peu nuancée.

Club de débauche

Moins racoleur et plus savoureux que ne laisse supposer sa bande annonce, le troisième long métrage de Kim Chapiron, inspiré d’une légende urbaine concernant l’école HEC, débute même comme une comédie à l’américaine, avec deux losers du cœur incapable d’attirer une fille jusqu’à leur lit. Jaffar (Karim Ait M’Hand) n’est pourtant pas du genre timide, seulement ses techniques de drague hasardeuses et sa sueur abondante ne l’aident aucunement dans sa quête. Son pote Dan (Thomas Blumenthal) est résigné : sa vision de la situation est une application de son apprentissage, affirmant qu’ils sont là sur un marché sexuel où ni lui, ni Jaffar n’ont de chance face à des produits de meilleurs qualités, venant de meilleurs milieux. Pour lui, cette grande école de commerce dans laquelle ils abordent leur deuxième année n’est utile qu’à une chose, se constituer un réseau pour avoir une chance de bosser plus tard, bûcher les cours n’étant qu’un leurre. La rencontre d’une nouvelle admise, Kelia (Alice Isaaz) va tout faire basculer lorsque cette dernière va proposer à une employée de supermarché d’accompagner Jaffar à une soirée étudiante, contre une quarantaine d’euros, pour payer le taxi. Et la charmante demoiselle, ayant repoussé les premières attaques de ses nouveaux camarades en se protégeant derrière l’homosexualité, sait se montrer convaincante. L’opération, renouvelée, attirera l’attention d’un élève d’une caste supérieure, Louis (Jean-Baptiste Lafarge), qui y verra l’occasion de monter un juteux business pour répondre aux demandes de mâles en difficulté avec la gente féminine.

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La Crème de la crème change alors de ton lorsque Jaffar se retrouve éloigné du trio d’entrepreneurs, ayant trouvé chaussure à son pied. Bien que le film se base sur un sophisme de Dan, il développe son concept sans jamais achopper, si ce n’est qu’il manque totalement de nuance dans son propos – notamment dans une séquence où Kélia s’en va recruter des proies faciles, des demoiselles derrière les caisses et comptoirs ou bien distribuant des journaux dans la rue. Car si c’est, à l’origine même, une proposition d’accompagner en soirée un élève, l’affaire se transforme en réseau de prostitution où les filles ne marchandent pas seulement leur temps mais leur corps. Difficile de croire qu’il est si aisé de convaincre à peu près n’importe qu’elle jeune femme évoluant dans un milieu modeste qu’elle peut tirer parti de son physique plutôt que de languir à un poste inintéressant. De cette problématique sur la prostitution, le film, comme ses protagonistes, se détournera aveuglément, et si cela aurait mérité un traitement plus approfondi, le film se rattrape grâce à ses personnages principaux, attachants dans leur misère sentimentale et leur cynisme comme moteur principal. Une empathie qui tient autant du scénario que du casting très réussi, mettant en lumière de jeunes et prometteurs comédiens. Un intéressante contraste physique est d’ailleurs obtenu des traits angéliques d’Alice Isaaz qui répondent aux expressions démoniaques que prend le visage de Jean-Baptiste Lafarge lorsqu’il sourit, bien que le plus innocent soit le cerveau originel du club, Dan. Une scène de drogue ira même jusqu’à illustrer ce lien tissé entre ces trois personnalités qui souffrent au fond d’une mauvaise vision du monde et des sentiments.

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Sans la maestria de The Social Network, La Crème de la crème regarde cette même génération troublée, sans autre repère que la réussite et l’hédonisme. Avec sa bande originale éclectique allant de Michel Sardou à Justice, ses pointes d’humour et ses séduisants acteurs, le film aurait pu constituer un solide portrait générationnel mais son manque de recul et sa mécanique pas toujours judicieuse endiguent sa portée. Dans un cercle infernal de beuveries et de coucheries, placé sous le signe de l’hystérie, la perspicacité de Kim Chapiron permet toutefois d’atteindre une issue intéressante pour ces jeunes marchands en débauche. Parfois fétide mais plus souvent sexy, voilà une oeuvre aussi plaisante que paradoxale.

3 étoiles

 

La Crème de la crème

creme-de-la-creme-afficheFilm français
Réalisateur : Kim Chapiron
Avec : Thomas Blumenthal, Alice Isaaz, Jean-Baptiste Lafarge, Karim Ait M’Hand, Marine Sainsily
Scénario de : ,
Durée : 86 min
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie en France : 9 avril 2014
Distributeur : Wild Bunch Distribution

Bande Annonce :

Article rédigé par Dom

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