[Cannes 2013] #08 Des corps abîmés

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Le mercredi 22 mai était placé sous le signe des corps abîmés, par les coups ou le destin. Trois films, Only God Forgives, All is lost, Grigris et un concert, Phoenix à la Plage Magnum Cannes.

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Mise à jour du 08/12/16 : avis à mettre à la poubelle. Explications.

Le nouveau film de Nicolas Winding Refn ouvrait le programme des festivités au Grand Théâtre Lumière à 8:30. Ryan Gosling et Refn sont réunis pour la seconde fois, après le succès de Drive, dans Only God Forgives, récit de vengeance se déroulant dans les rues de Bangkok. Ce parcours vindicatif, impliquant flics aux méthodes douteuses et petites frappes, débute par l’assassinat d’une jeune prostituée par Billy, le frère de Julian (Ryan Gosling). Lui-même massacré, la mère campée par Kristin Scott Thomas débarque pour venger son fils ainé tandis que Julian, mimant une vie normale et s’accrochant à un fil de droiture, se la joue trafiquant de drogue cool et mutique. Thierry Frémaux avait déclaré en conférence de presse lors de l’annonce de la sélection qu’il s’agit d’un film radical et punk, renouant avec les premiers longs métrages du cinéaste danois. C’est pourtant dans la descendance directe de Drive qu’il s’inscrit, pas seulement par la présence de Ryan Gosling – absent sur la croisette – mais par un style visuel et une ambiance sonores proches. Esthétisant comme jamais, poseur jusqu’au ridicule, Refn cherche un niveau d’abstraction qui vide toute substance, toute vitalité, dans une démarche de publicitaire vraiment détestable. D’aucuns évoquent la volonté de rompre avec Drive, mais Refn est un cinéaste avec la volonté de marquer l’histoire du 7ème art, alors rien ne justifie ce qui se déroule dans ce thriller aux accès de violence grotesques et à la finalité bien misérable. On peut ôter des mains la palme du pire film en sélection officielle de Takashi Miike pour la coller à Refn !
Only God Forgives, un film de Nicolas Winding Refn, en salle le 22 mai 2013.

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On enchaine avec une séance spéciale de All is lost de J.C. Chandor, avec pour unique acteur, Robert Redford. C’est le récit d’un naufrage, qui s’ouvre de façon assez classique, alors que « tout est perdu » pour revenir huit jours auparavant, lors du début du drame. Réveillé par de l’eau pénétrant dans son bateau, ce navigateur dont on ignore tout, même le nom, découvre qu’un container a ouvert une brèche dans la coque de son navire. L’urgence est au rafistolage, et avec des moyens de communication détruits, il faut continuer à naviguer jusqu’à ce qu’une terrible tempête renverse à nouveau le cours des choses. Formellement assez audacieux et réussi, les images superbes sont nombreuses dans All is lost. Mais le film souffre finalement de son parcours peu original, qui sent le déjà-vu malgré la métaphore qu’il déploie. En la personne de Robert Redford se situe l’autre problème. Loin d’être mauvais, l’acteur se montre trop âgé pour ce rôle : on sent la fatigue dans de petites tâches, le laborieux là où la vigueur devrait être de mise. Ce sont des détails dans certaines scènes – comme avec les fusées de secours -, car parfois, dans le déluge, le spectateur est renversé comme lui et souffre de cet enfer maritime, mais il aurait été probablement plus judicieux de choisir un acteur moins réputé et plus jeune pour camper cet unique personnage. Un film parfois frappant mais si évanescent.
All is lost, un film de J.C. Chandor, date de sortie française inconnue.

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Chose assez rare pour être soulignée, l’emploi du temps du jour permet de s’asseoir quelques minutes à un restaurant avant de continuer l’aventure cinématographique. L’unique représentant africain en Sélection Officielle est le tchadien Mahamat-Saleh Haroun, présentant à 16:00 Grigris au Grand Théâtre Lumière. Grigris, c’est le surnom de Souleymane Démé – également appelé par son véritable nom dans le film –, un jeune homme handicapé par une jambe paralysée mais qui ne l’empêche pas de danser d’une façon hallucinante. C’est sa passion, la danse, quand son corps peut se mouvoir en rythme, avec harmonie, entouré par des gens en délire. Et quand il ne danse pas, le handicap ressurgit violemment. Sa démarche est similaire à celle d’un pantin désarticulé. Courir ? Impossible. Payé une misère pour ses performances dans les boites de nuit, Grigris rejoint des trafiquants d’essence pour payer les frais d’hospitalisation de son beau-père. En parallèle, il rencontre Mimi (Anaïs Monory), une prostituée qui rêve de devenir mannequin. On ne fait pas la découverte d’un acteur incroyable dans Grigris mais celle d’un homme incroyable. Souleymane Démé fascine par son combat au quotidien contre le handicap, et sa façon de l’embrasser avec énergie dans sa passion. Le récit touche au thriller mais Haroun se concentre avant tout sur l’humain, en cinéaste faisant preuve d’une grande compassion. Une façon de traiter ses personnages qui est si touchante que l’on pardonne les nombreuses maladresses et le jeu d’acteur assez faible de ce film au final très réussi. Contrairement à son précédent film, Un homme qui crie, qui avait remporté le Prix du jury en 2010, on doute que Grigris puisse s’imposer au palmarès face aux autres longs métrages mais sa présence dans la sélection est vraiment réjouissante.
Grigris, un film de Mahamat-Saleh Haroun, en salle le 28 août 2013.

Pour la plus grande joie des vendeurs de parapluie ambulants, la pluie nous prend au dépourvu à la sortie du Grand Théâtre Lumière. C’est à croire qu’il y a un complot derrière tout cela, avec des annonces météorologiques qui nous mettaient à l’abri des intempéries jusqu’à la fin du festival. C’est donc à nouveau la panique sur la croisette, les boutiques sont envahies par les festivaliers cherchant à se protéger tandis que les plages aménagées se replient vers leur tentes. A la Terrazza Martini, Woodkid répète pour son concert dans la nuit mais je rejoins les camarades d’Après la Séance dans un bar. Pur hasard, séance de dégustation de Pastis Rosé. On revoit les plans pour la soirée, Marine de 2MuchPoney a des places pour le concert de Phoenix à la plage Magnum Cannes. De 23h15 à minuit, ils ont électrisé la plage de leurs morceaux rock-electro, Thomas Mars finira même le set sur le bar au milieu de la salle ! La soirée continue en open bar jusqu’à deux heures, on y croise des animateurs de Canal+ et discutent toujours et encore des films découverts dans la journée. Le sommeil réparateur est encore une fois remisé pour découvrir Nebraska d’Alexander Payne à 8:30… Photos du concert ci-dessous.

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Article rédigé par Dom

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4 commentaires

  1. wah ! ton avis sur only god forgives est pour le moins radical… je suis encore dans un entre deux de mon côté… tu avais aimé le guerrier silencieux ? (et donc pas aimé drive apparemment ?)

  2. Si si, j’aime beaucoup drive et quant au Guerrier Silencieux, j’adore la première partie et déteste la seconde. Du coup, ce film est pour moi très représentatif de Refn, capable du meilleur comme du pire.
    (Allez, je repars sur la croisette !)

  3. je ne vais sûrement pas rater ONLY GOD FORGIVE ! J’adore l’acteur de Drive ! Merci pour ton article !

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