[Cannes 2013] #06 Question de fric

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La machine cannoise a trouvé son régime de croisière. Trois films pour ce lundi 20 mai : Bouclier de paille, Un Château en Italie et Séduits et abandonnés. Des oeuvres où il est, en partie ou en plein coeur, question de pognon.

Une journée qui débute sous le sceau de la déception avec Bouclier de paille de Takashi Miike, en compétition officielle, thriller qui tient parfaitement de la série B, explorant maladroitement la crise économique touchant le Japon et poussant tout un chacun, dans une traque vicieuse, au crime. La petite fille d’un magnat du sol nippon a été massacré par un criminel récidiviste. Il offre publiquement au travers d’un site internet et de la une d’un journal la somme de 1 milliard de yens à la personne qui tuera le supposé meurtrier, mais toutefois, cela doit être fait avec l’accord de l’Etat. Une unité spéciale de la police est alors chargée de sa sécurité pour le conduire au parquet mais la méfiance est de mise même parmi ce groupe. Ce qui aurait pu donner lieu à un thriller explosif, dominé par le suspense s’enterre dans une mise en scène et des dialogues sans saveur, et la liste des doléances s’étend à des musiques insipides et à des acteurs peu charismatiques. Collectionnant les poncifs dans chaque scène, Bouclier de paille se dresse malheureusement comme l’intrus de la sélection officielle. Un gros raté pour Miike qui avait montré au précédent Festival de Cannes le génial Ai to makoto (For love’s sake) hors compétition. Entre le constat balourd d’une société gangrénée par la pauvreté et un éloge poussif à la justice, Bouclier de paille se plante sur tous les tableaux.
Bouclier de paille, un film de Takashi Miike, date de sortie française inconnue.

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Ce lundi 20 mai ouvre le temps des sacrifices, quand les films alléchants sont trop nombreux chaque jour, obligeant à établir de nouvelles priorités. Malgré ma curiosité pour As I lay dying de James Franco et mon admiration pour Paolo Sorrentino, j’ai délaissé ces films pour découvrir notamment le nouveau Valeria Bruni-Tedeschi, Un château en Italie, présenté au beau milieu de l’après-midi et qui aura attiré dans le Grand Théâtre Lumière, en plus des jurés et de l’équipe du film, Brian De Palma et Paolo Sorrentino. Bruni-Tesdechi nous invite dans une nouvelle comédie dramatique centrée autour de sa famille – c’est d’ailleurs sa propre mère qui campe la figure matriarcale. Nous sommes directement dans le prolongement de son précédent film, Actrices. A nouveau, son personnage est en crise, elle veut devenir mère alors que le temps ne lui permet plus, du moins, directement. Louis Garrel est toujours là, l’homme, le géniteur rêvé. Par contre, la carrière d’actrice, oubliée. Et il y a ce fameux château en Italie, qui ne peut plus être entretenu, on envisage de vendre le Bruegel familial tandis que le frère, atteint du SIDA, refuse de voir l’héritage partir aux enchères. Bruni-Tedeschi n’a aucun mal pour égayer le spectateur à partir de scènes décalées qu’elle provoque par ses angoisses et certains dialogues savoureux – des scènes autour de la fécondation in vitro très drôles –, toutefois, elle ne parvient pas vraiment à toucher par son univers dans les hautes sphères de la société – bien que frappé par le manque d’argent. Un film qui pourrait séduire ses adeptes, mais laisser les autres spectateurs en dehors de ces mésaventures foncièrement banales. Photo ci-dessous, l’équipe du film à la fin de la projection.

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Un château en Italie, un film de Valeria Bruni-Tedeschi, en salle le 2 octobre 2013.

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Après un tour sur la croisette, ensoleillée, débordant de touristes et festivaliers, on finit le programme des projections à une séance spéciale à la salle du Soixantième avec Séduits et abandonnés de James Toback. Il s’agit d’un documentaire en partie tourné à Cannes l’année dernière, réalisé avec l’étroite collaboration d’Alec Baldwin, présent avec Toback pour introduire le film. L’idée était de montrer les difficultés de monter un projet de film aujourd’hui, même avec des acteurs de renom – mais qui ne sont plus « bankables ». Leur but était de proposer à des producteurs un projet de film avec Alec Baldwin et Neve Campbell – ce sont les deux conditions non négociables – qui serait une sorte de Dernier Tango à Paris mais replacé durant la guerre en Irak. Un peu loufoque, donc, peu crédible et n’attisant guère l’envie des producteurs – c’est là la grande faiblesse de cette démonstration. Toutefois, le documentaire est composé de nombreuses interviews passionnantes, de réalisateurs et acteurs qui, un jour ou même encore aujourd’hui, ont rencontré des difficultés pour monter leurs projets. On peut alors entendre des anecdotes de Martin Scorsese, Francis Ford Coppola, Jessica Chastain, Diane Kruger, Ryan Gosling, James Caan ou encore Roman Polanski. Entre célébration du cinéma, du Festival de Cannes et de son marché du film, Séduits et abandonnés dresse le constat d’un cinéma fonctionnant purement comme une industrie, où l’on cherche avant l’art, à vendre un produit, avec des éléments qui attirent le spectateur. Le fil rouge ? Une citation d’Orson Welles qui déclare avoir passé 95% de son temps à monter le financement de ses projets pour seulement 5% de tournage. Ce n’est pas une vie, disait le réalisateur de Citizen Kane. Pas suffisamment profond, ce documentaire est toutefois une plongée intéressante dans les dessous de la production. On en ressort avec une triste morale : le succès ne rime que très rarement avec la carte blanche pour d’éminents cinéastes. Tout est question de pognon, tout ! Photo ci-dessous, James Toback et Alec Baldwin présentant le film.

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Séduits et abandonnés, un film de James Toback, date de sortie française inconnue.

La nuit se déroule sur le bateau Arte, toujours avec la même double ambiance lounge et clubbing qui permet à tout le monde d’y trouver son compte. L’absence de la pluie permet même de profiter de la vue sur le port et une partie de la ville sur sa terrasse supérieure. Cette nuit, on pouvait notamment y croiser Emilia Derou Bernal (Donoma).
Mardi, Michael Douglas et Matt Damon seront sur la croisette pour Ma Vie avec Liberace de Steven Soderbergh, et Jessica Chastain devrait être dans les parages pour présenter Cléopâtre (Mankiewizc) en séance Cannes Classics. Je vous donne des nouvelles de tout cela très vite.

Article rédigé par Dom

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