[Critique] Boyhood, réalisé par Richard Linklater

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Richard Linklater, derrière l’exceptionnelle trilogie Before Sunrise, Before Sunset, Before Midnight, explore l’enfance et l’adolescence avec un dispositif audacieux. Dans Boyhood, le cinéaste a relevé le défi de filmer ses acteurs sur une période de douze ans. Une œuvre magnifique.

Œuvre du temps

En réunissant Julie Delpy et Ethan Hawke tous les dix ans depuis Before Sunrise (sorti en 1995), Richard Linklater exprimait déjà le désir de filmer le développement d’une relation au fil du temps, sans ellipse cinématographique ni le moindre artifice. Le récit et la relation entre le couple s’est forgé avec l’œuvre du temps, l’évolution propre du cinéaste et de ses comédiens. Alors que son activité n’a jamais fléchi au cours de la dizaine d’années écoulée, Linklater préparait Boyhood, l’histoire d’un garçon de six ans que l’on accompagne jusqu’à ses dix-huit ans. Une œuvre dans laquelle on retrouve les mêmes comédiens (et en grande partie la même équipe technique), réunis chaque année pour quelques jours afin de continuer à écrire des pages de la vie de Mason (Ellar Coltrane) et de ses proches. Douze années de travail dont la direction dépendait de l’évolution même du garçon et non d’un rigide scénario, laissant comme souvent avec Linklater la possibilité aux acteurs de s’exprimer et participer entièrement au processus créatif. Tout débute par la séparation des parents de Mason, Olivia (Patricia Arquette) et Mason Senior (Ethan Hawke). Pour Mason et sa sœur aînée taquine, Samantha (Lorelei Linklater), direction une nouvelle maison avec leur mère qui s’éprendra de son professeur de psychologie. Mason et Sam grandissent alors entre un nouveau foyer et les weekends avec leur père.

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Constitué de divers épisode de la vie de son protagoniste suivant un ordre chronologique, Boyhood ne s’embarrasse d’aucune indication temporelle. C’est le quotidien des personnages qui se porte témoin du temps qui s’écoule, qu’il s’agisse bien entendu de la croissance de Mason et sa sœur, du vieillissement des parents ou bien des événements et objets ayant marqué une année. Elections présidentielles, sagas Harry Potter et Star Wars, chansons et jeux vidéo situent l’action autant qu’ils nous renvoient à notre propre vie. Que faisions-nous lors de la première campagne présidentielle de Barack Obama ou bien à la sortie de la console Wii de Nintendo ? Plus que dans tout autre film, Boyhood dégage une authenticité unique qui nous connecte profondément à cette galerie de personnages simples, renforcée par la sobriété de la mise en scène. Malgré un second divorce pour Olivia, le film distille une véritable sérénité sur la vie et ses aléas, au gré de conversations et du surgissement de nouveaux personnages. Et toujours, le temps fait son œuvre, naturellement. Du petit garçon allongé dans l’herbe observant le ciel, Mason devient petit à petit un jeune homme passionné par la photographie. Absent pendant un long pan du film, on retrouve tout à coup Ethan Hawke avec un visage redéfini par des rides qui n’épargnent pas non plus Patricia Arquette en mère dévouée. Et puis il y a Sam, qui, un jour, exaspérait son frère en chantant du Britney Spears et voit pousser les ailes de son indépendance. C’est une véritable expérience de vie sous fond de musique pop-rock qu’offre Boyhood, une expérience qui témoigne aussi de la culture américaine des douze dernières années au travers de scènes parfois triviales ou bien de détails. Avec ce film des plus attachants, l’exploit du cinéaste se situe probablement dans cette synthèse cohérente et fascinante, compression de tout un fragment de vie dans un espace aussi réduit que représente un film de deux heures et quarante-cinq minutes. On rêverait maintenant de voir un film capable de couvrir ainsi toute une vie.

4 étoiles

 

Boyhood

boyhood-afficheFilm américain
Réalisateur : Richard Linklater
Avec : Ellar Coltrane, Patricia Arquette, Lorelei Linklater, Ethan Hawke, Marco Perella
Scénario de :
Durée : 145 min
Genre : Drame
Date de sortie en France : 23 juillet 2014
Distributeur : Diaphana Distribution

Bande Annonce (VOST) :

Article rédigé par Dom

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