Critique du film Exodus

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Moïse, les dix plaies d’Egypte et l’exode du peuple hébreu, tel est le récit que revisite ce péplum de Ridley Scott. Bien que la direction artistique se montre impressionnante, Exodus a le souffle court et peine pour s’élever. Il n’y a pas de miracle, Ridley Scott ne fait décidément plus de grands films.

Morne péplum

Ridley Scott est un réalisateur brillant mais qui perd pied depuis quelques années : un Robin des bois catastrophique, un retour à la saga Alien (Prometheus) sublime visuellement mais avec un scénario décevant, et, avant cet épisode biblique, une collaboration non concluante avec Cormac McCarthy (Cartel). Passons sur la polémique ayant éclaté dès la sortie américaine du film, dans laquelle Scott est pointé du doigt pour n’avoir donné aucun rôle principal à des acteurs de couleur – plus d’infos ici – pour nous concentrer sur ce film dont les enjeux ne tombent pas loin de Gladiator : un chef de guerre déchu va devoir se soulever contre l’autorité d’un empereur/roi mauvais qu’il a pourtant côtoyé comme un frère. Tragique déchirement. Moïse est campé par un Christian Bale dont le talent n’impressionne presque plus : le gallois peut s’approprier n’importe quel personnage avec une aisance géniale, d’un psychopathe à un personnage biblique en passant par un super-héros ténébreux. En face, un tant soit peu moins convaincant, Joel Edgerton se glisse dans la peau de Ramsès II. Exodus débute à l’aube de la séparation de ces deux hommes, lors de l’accès au trône de Ramsès II, roi tyrannique qui se verra puni, lui et son peuple, au travers des dix plaies d’Egypte – probablement la partie la plus excitante du film, avec son renfort d’effets spéciaux que ne bouderait pas un Roland Emmerich.

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Si Christian Bale apporte tout son charisme au cœur d’Exodus, notamment dans son exil et lorsqu’il prend la tête du peuple hébreu, Ridley Scott semble mettre en scène le destin du prophète judaïque comme un simple artisan sous les ordres des studios. Où est la fibre émotionnelle et le versant épique de son Gladiator ? Où sont les séquences inouïes qui composent Alien et Blade Runner ? Loin, quand on voit l’enrobage hollywoodien – bande originale, montage – dominant le film d’un bout à l’autre. Même la souffrance des esclaves hébreux est traitée avec trop de distance pour nous saisir. Cerise sur le gâteau, l’exploitation inutile en 3D nuit aux qualités de la photographie de Dariusz Wolski, dont la scène la plus belle, probablement, se déroule de nuit, lorsque Moïse converse pour la première fois avec le divin, représenté par un enfant. Si l’on peut saluer la beauté visuelle du film, cela tient aussi au spectaculaire travail sur les décors et costumes, Exodus se refusant d’être un pur produit numérique avec ses milliers de figurants et décors construits minutieusement. A l’opposé de l’audacieux et baroque Noé de Darren Aronofsky, Exodus cherche la grandeur de classiques, tels que Ben-Hur (William Wyler), Spartacus et bien entendu Les Dix commandements. Malgré des moyens colossaux, l’entreprise est un semi-échec, qui se contente de conter son épopée sans grande conviction. Dédié au regretté Tony Scott, Exodus n’est que le songe d’un grand péplum d’antan, qui aurait troqué son essence contre quelques effets numériques. Nous attendons bien plus de vous, M. Ridley Scott.

3 étoiles

 

Exodus

exodus-afficheFilm américain, britannique, espagnol
Réalisateur : Ridley Scott
Avec : Christian Bale, Joel Edgerton, Aaron Paul, John Turturro, Sigourney Weaver, Ben Mendelsohn
Titre original : Exodus : Gods and Kings
Scénario de :
Durée : 150 min
Genre : Péplum, Action
Date de sortie en France : 24 décembre 2014
Distributeur : Twentieth Century Fox

Bande Annonce (VOST) :

Article rédigé par Dom

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5 commentaires

  1. Sans crier au génie Ridley Scott signe un très bon peplum…

  2. Autant j’ai trouvé Noé très « néo-pompier » autant Exodus m’a soufflé tant sur le fond que la forme. Des tableaux grandioses face au portrait sec et austère de Moïse. Ce contraste m’a emballé. Autre idée marquante, celle de montrer Dieu comme un enfant immature. Je l’interprète comme une bouleversante confession. Celle du désarroi et de la colère qui habiteraient le coeur de ce géant du cinéma après la perte de son frère. Le film est d’ailleurs dédié à Tony Scott.

  3. @Francisco : « Noé », qui fait partie de mon Top 20 2014 – ici : http://youtu.be/ZdN1IDeem54 – avait le mérite de prendre plus de risques, autant dans son récit que sa photographie atypique.
    Ensuite, pour le message que pourrait porter l’enfant-dieu, il faut aussi garder en tête que Ridley Scott ne signe pas les scénarios de ses films. Je ne me suis pas plus penché sur la question, mais pour moi, le film symbolise que Tony Scott est désormais sur une autre rive.

  4. Tu as raison, sur l’idée de l’autre rive. Belle idée et belle image. Quant à la participation de Scott au scénario je pense que les cloisons ne sont pas étanches sur un projet de cette envergure. A vérifier plus tard dans les bonus du futur Blu-ray mais je suis persuadé d’avoir lu que l’idée du Dieu-enfant à bel et bien été suggérée par le maitre d’oeuvre de cet étrange et fascinant péplum.
    Concernant Noë, je ne dis pas que le film est totalement raté. La séquence du déluge puis celles de la traversée sont assez hypnotiques mais j’ai eu beaucoup de mal à digérer les anges de pierre. J’ai aimé les hommes-arbres du Seigneur des Anneaux mais ici, ces gros personnages numériques dans lle contexte mystico-ésotérique de l’ensemble, j’ai trouvé que cela jurait un peu. C’est un détail qui m’a un peu sorti du film. Mais grande prestation de Russell Crowe. Et des tableaux somptueux. A te lire, je me dis qu’il faudra sans doute que le le revois…
    Amicalement,
    Francisco

  5. Les gros personnages auraient pu me sortir du film, mais je suis resté dedans. La photographie m’a vraiment ébloui : les plans crépusculaires, le vol des colombes, … En fait, toutes les qualités esthétiques du film m’ont protégé de tout regard critique envers les libertés prises par le récit.

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