Cannes 2011 : Palmarès et Bilan Personnel

Toutes les bonnes chose ont une fin ; le 64ème Festival de Cannes s’est achevé dimanche soir. Voici le palmarès et mon bilan personnel de cette passionnante aventure.

Dimanche 22 mai 2011, le jury du Festival de Cannes, présidé par Robert De Niro remet la Palme d’Or à The Tree of Life. Une récompense à la fois évidente et audacieuse : le nouveau film de Terrence Malick est une oeuvre de cinéma pure, personnelle, débarrassée des conventions, portée sur la poétique du cinéma. J’ai eu la chance de le découvrir à Cannes et j’ai hâte de le revoir encore une fois en salles, au moins ! Les autres récompensés sont les suivants : Bir Zamanlar Anadolu’dade Nuri Bilge Ceylan et Le Gamin au Vélo des frères Dardenne, ex-aequo pour le Grand Prix. Meilleure interprétation féminine : Kirsten Dunst dans Melancholia. Meilleure interprétation masculine : Jean Dujardin dans The Artist. Prix de la mise en scène : Nicolas Winding Refn pour Drive. Prix du scénario : Joseph Cedar pour Footnote. Prix du jury : Polisse de Maïwenn. Si vous aviez lu mes pronostics dans mon précédent article, vous constaterez que j’ai vu juste pour la Palme d’Or et la Mise en scène – statistiquement mon taux de réussite est faible. La performance de Jean Dujardin est excellente, comme à son habitude, mais je n’avais pu me prononcer fermement, n’ayant pas vu les films avec une forte présence masculine en tête d’affiche (comme Pater, Habemus Papam ou encore This Must Be The Place). Je suis assez surpris de la victoire de Kirsten Dunst sur Tilda Swinton qui m’a bien plus marqué malgré la projection de We Need to Talk About Kevin en début de Festival – les repères temporels tendent à s’effacer et certains films semblent déjà si loin ! Je pensais vraiment que Pedro Almodovar remporterait un prix pour le scénario de La Piel que Habito, c’est Joseph Cedar qui s’en empare avec Footnote. Assez décrié par les festivaliers que je connais, c’est à mon humble avis la comédie dramatique la plus intelligente de la Sélection Officielle ; la récompense est loin d’être volée. Concernant le Grand Prix, je n’ai pas eu la chance (encore) de voir Le Gamin au Vélo, mais ça ne serait tardé puisque le film est en salles. Par contre, je regrette un peu de ne pas avoir donné sa chance à Bir Zamanlar Anadolu’da, abandonné pour Koi No Tsumi – mais le Festival de Cannes est une aventure aux choix et sacrifices infinis. Polisse de Maïwenn est couronné du prix du jury ; on se doutait fortement qu’il recevrait un prix vu l’accueil qui lui a été réservé.

Pour revenir sur la dernière soirée cannoise, non, nous ne sommes pas parvenu à obtenir d’invitation pour la cérémonie de clôture. Nous étions pourtant trois à quadriller le boulevard de la croisette près du Grand Théâtre Lumière, armés de pancartes diverses mais la concurrence était rude et la distribution rare. Suivant les conseils de Sandra de InTheMoodForCannes, nous nous sommes alors rendu à la salle Debussy qui retransmet la cérémonie – et nous avons failli être recalé car j’ai eu la mauvaise idée d’annoncer devant le personnel « Eh bien nous verrons la cérémonie dans la petite salle. » Debussy étant une magnifique salles de plus de 1000 sièges, l’ambiance est sympathique alors que nous sommes seulement à quelques mètres de la « véritable » cérémonie.

On est juste en face de Robert De Niro... ou presque

Détour au McDo – en costard s’il vous plait –, où nous croisons Marina Foïs en chemin, avant de découvrir le film de clôture, Les Bien-Aimés de Christophe Honoré, pour sa seconde et ultime projection à 23:30. Je n’irai pas par quatre chemin : le générique introductif est sublime mais le destin de cette mère et de sa fille, qui s’étend de 1968 à nos jours est pénible à suivre. La partie comédie musicale est des plus insupportables et le film gagnerait sans nul doute en qualité sans ces chansons insipides. Fort dommage de conclure le festival là-dessus. Au cours de la séance, on m’a tuyauté sur Kirsten Dunst qui dinait au Majestic, un luxueux hôtel en face du Grand Théâtre Lumière. Malheureusement, à notre arrivée, il n’y avait plus aucune trace de l’actrice récompensée pour sa prestation dans le nouveau film de Lars Von Trier… Dans la rue, toute installation propre au festival est démontée au plus vite : barrières, plages aménagées, tout disparaît sous nos yeux, dans la précipitation, pour redonner à Cannes son visage habituel…

Dans le TGV direction Paris, on se sent encore un peu dans le microcosme du festival : ça discute du palmarès, ça grogne parce que ça n’a pas pu accéder à la montée des marches finale et puis, en regardant de plus près, y a Geneviève de Fontenay qui sirote un café.

La veille du festival, j’avais établi une liste de 24 films à ne pas manquer. La liste originale n’a pas pu être respecté mais le total de films visionnés est de 27. Je n’aurais cependant pas vu Sleeping Beauty, ayant été recalé en séance de rattrapage puis abandonné suite aux retours négatifs. Je ne suis pas parvenu à obtenir d’invitation pour Le Gamin au Vélo et sa sortie imminente en salles m’a dissuadé de le voir à Cannes – je pensais qu’il devait débarquer au cinéma en novembre ! J’ai manqué le nouveau cru Gus Van Sant (et ce n’est pas faute d’avoir essayé), Take Shelter, Snowtown, Play et mon plus grand regret : The Murderer. Ma grande découverte – pour ne pas dire grosse baffe dans la face – du festival c’est Wu Xia de Peter Ho-Sun Chan ; j’espère que cet incroyable film trouvera rapidement un distributeur français, il me tarde déjà de le revoir. La grande déception, c’est Melancholia de Lars Von Trier. Celui qui a tenu toutes ses promesses, c’est bien sûr The Tree of Life. Je reviendrai sur certains films dans quelques jours, en leur consacrant une réelle critique et non des impressions lâchées à 4h du matin après une exténuante journée.

Pour revenir sur certains détails du festival, je dirais que le badge cinéphile est un bon ticket d’entrée pour partir à l’assaut du Festival de Cannes. L’accès à Un Certain Regard, à la Quinzaine des réalisateurs et à La Semaine de la Critique n’est pas compliqué, sauf pour les films très attendus (comme celui de Gus Van Sant). Inutile également d’attendre sous le soleil pendant des heures pour ces sélections : j’ai accédé à de nombreuses séances à la toute dernière minute. Par contre, concernant la Sélection Officielle, ce badge est quasiment inutile : l’accès de dernière minute n’est possible que pour les séances à partir de 16:00, sauf la montée des marches de 19:00 (ou 19:30) : autant dire qu’il est presque impossible d’assister à ces projections en comptant uniquement sur ce pass. Le retrait d’invitations (très rares) ou la mendicité est alors obligatoire (encore une fois, je remercie Marine de 2MuchPoney pour le tuyau), ou bien encore d’avoir de bons contacts – des rencontres faites sur place m’ont permit d’assister à des séances de la sélection officielle, comme Ichimei de Takashi Miike. Il faut également savoir qu’il existe deux types d’invitations : les bleues, les plus pratiques car utilisables par tous, et les oranges, qui nécessitent d’accéder à la salle avec quelqu’un possédant un badge supérieur à celui des cinéphiles – qui est donc inutile dans ce cas. Il est facile de trouver dans la file des journalistes/producteurs/exploitants ou autre prêt à dire au premier contrôle de sécurité qu’ils vous accompagnent. C’est stupide mais indispensable, j’ai parlé avec des personnes qui n’ont pas pu accéder au Grand Théâtre Lumière car elles possédaient des billets oranges et avaient tenté de rentrer sans accompagnateur. Autant dire alors que l’ont peut profiter du Festival de Cannes sans aucun badge ; les séances de la Semaine de la Critique et de la Quinzaine sont ouvertes à tous via à un système de billetterie (et il y a aussi le cinéma de la plage, le soir). Le badge cinéphile permet simplement l’accès à Un Certain Regard ainsi que les autres sélections parallèles gratuitement et d’hypothétiques invitations qui sont souvent des places pour Cannes Classics. Les autres badges (exploitants, professionnels, …) disposent d’un système de points qui leur permettent de réserver, dans la limite des places disponibles, des invitations à des séances de la Sélection Officielle à n’importe qu’elle heure. Une montée des marches avec l’équipe du film coûte évidemment plus de points qu’une projection matinale à 8:30. Si certaines personnes abandonnent facilement leur invitation pour une raison quelconque, c’est qu’il vaut mieux pour eux que leur billet soit validé à l’entrée du Grand Théâtre Lumière pour éviter des pénalités – dont je ne connais pas la nature. Glaner une invitation (voire plus) dépend avant tout de l’endroit où l’on cherche et d’un peu de chance. Quelques minutes avant la séance de l’après-midi de The Tree of Life, j’ai tenté sans grand espoir d’obtenir un billet devant Romain de Lyricis et deux étudiants de l’ESRA. Cinq minutes plus tard, une jeune productrice – Claire –, me donnait un billet. Elle m’a avoué avoir croisé de nombreuses personnes âgées recherchant une invitation mais elle souhaitait l’offrir à un jeune – voilà peut-être pourquoi les antirides et le botox ont tant de succès !

Le badge cinéphile ne donne pas accès aux séances de rattrapage dans les salles de la soixantième, Bazin et Bunuel – seulement des invitations permettent d’y accéder. Il y a cependant des projections de rattrapage dans trois cinémas reculés par rapport à la croisette, mais à nouveau, il n’est pas toujours aisé d’accéder aux séances car la capacité de ces salles est bien inférieure. J’ai vu Polisse à La Licorne mais ce fut une chance de rentrer dans la salle malgré être arrivé une heure avant la séance… Heureusement que je suis parvenu à voir La Piel que Habito, le film d’Almodovar, en séance de l’après-midi au Grand Théâtre Lumière : le lendemain, à la Licorne, les cinéphiles attendaient déjà en rang 2h30 avant le début de la séance !

Difficile de s’ennuyer dans les files d’attente tant il y a de personnes sympathiques avec qui débattre sur tel ou tel film et si le bavardage n’est pas votre tasse de thé, des quotidiens sont distribués partout, que ce soit la presse généraliste (métro, direct matin, nice matin, …) ou la presse spécialisée dans le cinéma (Screen, Le Film Français, Variety, The Hollywood Reporter, …). Chaque jour, un fascicule des projections du lendemain est distribué, j’en ai fait la collection car leur mise en page est élégante et une actrice hollywoodienne est toujours en couverture – à l’exception de cette journée où nous avions Cary Grant en short…

Mon bilan personnel de ce festival est donc extrêmement positif : j’ai vu énormément de films – quasiment ce que je vois en cinq mois étant donné ma faible fréquentation des salles de cinéma –, fait d’autant plus de rencontres et assisté à quelques soirées sympathiques, notamment celles à la villa des Inrocks. Je ne suis pas mécontent de retrouver un rythme de vie normal, avec un déjeuner et un diner chaque jour et plus d’heures à consacrer à l’oreiller, les yeux clos ; toutefois, je crains avoir été contaminé par le virus Cannes et l’idée d’y retourner est plus qu’alléchante.
Malgré mon manque d’assiduité – vraiment, les journalistes qui parviennent à écrire des critiques structurées chaque jour ont tout mon respect –, j’espère avoir retranscris au mieux mes impressions sur Cannes et les films présentés et vous avoir donné l’envie de tenter l’expérience. Les demandes d’accréditations sont à faire en début d’année, tous les détails peuvent être trouvés sur le site officiel du Festival de Cannes.

Encore des remerciements à Marine de 2MuchPoney, Romain de Lyricis, Louisa, Sandra de InTheMoodForCannes, Nico de Filmosphere, Lucile de Elle aime le cinéma, Cédric S., Selim, les étudiants de l’ESRA, Thomas, Julien H., Viguen, et tous les inconnus qui ont fait de mon premier Festival de Cannes une réussite.

Vous pouvez également (re)lire les épisodes précédents :
Prologue
Minuit à Cannes
Des hauts et des bas
Hors-série #1
Pas de pitié pour le ciné
Hors-série #2
Melancholia ?
The End

A voir aussi : Cannes 2011 en photos et vidéos.

Article rédigé par Dom

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3 commentaires

  1. Ton journal de bord donne vraiment envie, même si en fait participer au festival de Cannes est un rêve depuis plusieurs années. Si j’en ai la possibilité, je tenterai l’expérience un jour. Mais bon cette année, nous, pauvre spectateur lambda, on a aussi eu la chance de découvrir la Palme avant que le film soit primé ! Du coup le verdict avait une autre saveur (surtout parce que j’ai adoré le film). Car si j’adore suivre Cannes, le gros problème est quand même cette frustration d’entendre parler de films que l’on ne pourra pas voir avant des mois !

  2. J’ai l’habitude de suivre les conférences de presse à la TV, faute de pouvoir assister aux projections des films. C’est intéressant de l’intérieur car tu montes ton propre pronostic au fur et à mesure, même si je ne me suis pas consacré exclusivement sur la Sélection Officielle. A ma vision de The Tree of Life, je le voyais comme un Grand Prix du Jury, mais au terme du festival, il s’est imposé à mes yeux comme l’unique prétendant à la Palme d’Or.
    En tout cas, saluons EuropaCorp pour sa distribution de The Tree of Life, de nombreux pays ne sont pas prêt de le découvrir avant la fin de l’été.

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