Critique : Somewhere (Sofia Coppola)

Somewhere

Film américain
Réalisatrice : Sofia Coppola
Avec : Stephen Dorff, Elle Fanning, Chris Pontius, Michelle Monaghan, Kristina Shannon, Karissa Shannon, Lala Sloatman
Scénario de : Sofia Coppola
Directeur de la photographie : Harris Savides
Monteuse : Sarah Flack
Durée : 97 mn
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie en France : 5 janvier 2011

 

 

 

 

La trame :

Johnny Marco est une star du cinéma qui mène une vie léthargique au Château Marmont. L’arrivée de sa fille, qui doit passer quelques jours avec lui, le sort de sa torpeur.

 

Bande Annonce (VOST) :

 

Critique

Quatrième long-métrage de Sofia Coppola, Somewhere s’est distingué avant même sa sortie en salle en recevant le Lion d’Or de la 67ème Mostra de Venise. Comme Marie Antoinette, cette nouvelle œuvre est vouée à diviser, la cinéaste opérant de radicaux changements dans sa mise en scène pour aborder son sujet avec sobriété.

D’un château l’autre

Dans un bond de deux cent ans, Sofia Coppola met à nouveau les pieds dans les hautes sphères de la société. Le château de Versailles est abandonné pour un repère privilégié du tout-Hollywood, le Château Marmont, luxueux hôtel qui permet aux stars de vivre à l’abri de regards indiscrets. Le carrosse, obsolète, est remplacé par une auto de l’écurie au fameux cheval cabré. Seul le héros reste inchangé : Johnny Marco (Stephen Dorff) est un prince des temps modernes, un acteur américain reconnu de tous et surtout, de toutes.
Les similitudes avec les deux précédents films de Sofia Coppola – Lost in Translation et Marie Antoinette – sont indiscutables, pourtant, Somewhere marque un changement radical dans sa filmographie. La réalisatrice économise les plans et mouvements de caméra et, plus frappant encore, les ornements musicaux sont abandonnés pour attribuer une place purement – ou presque – diégétique aux rares morceaux rescapés. Le lyrisme se dissipe alors pour mieux nous plonger dans le quotidien morbide de l’apathique star du cinéma.

Acteur à la dérive

Archétype même du jeune acteur en dépression malgré la gloire et la reconnaissance internationale, Johnny Marco tourne littéralement en rond, comme le montre le plan fixe d’ouverture où il enchaine, seul, les tours de circuits à bord de son bolide inaccessible pour le commun des mortels. Fêtard dégouté, queutard désenchanté, Johnny se défonce aux nymphes blondes. Qu’elles pratiquent le pole dance dans sa chambre ou qu’elles croisent sa route inopinément, chacune doit, inévitablement, s’ajouter à son déconcertant tableau de chasse. Cette obsession pour les plaisirs charnels dans lesquels Johnny ne semble plus trouver de plaisir, témoigne d’un manque affectif profond, d’une coupure flagrante avec la réalité. Ses pulsions sont quasi animales. Du haut de sa tour d’ivoire, le prince, parmi les belles, souffre en silence.

Un père, une fille

La liaison entre Johnny et une certaine Layla a donné naissance à Cleo, jouée par Elle Fanning, soeur cadette de Dakota, adorable gamine au visage angélique remarquée chez David Fincher dans Benjamin Button. Comme chaque fille qui va et vient dans la vie de l’acteur, Cleo joue de son corps pour charmer et capter l’attention de son père. Pas de danse sulfureuse pour l’enfant de onze ans mais une session de patinage artistique, suivie par une compétition sur le jeu guitar hero avec un morceau univoque : So Lonely, de The Police. En accord avec le récit, la symbolique de Somewhere est simple, sans pour autant constituer une tare. Elle Fanning illumine le métrage comme elle illumine la vie de Johnny. Leurs escapades sont des bouffées d’air pur et chaque retour fatidique à la chambre 59 de l’hôtel sur Sunset Boulevard est une véritable punition. La grande réussite du film réside dans cette communion du quotidien, ce partage des sentiments, des émotions, cristallisé par un duo d’acteurs attachants.

Il est également amusant de voir dans Somewhere un écho à Tetro, dernier film en date de Coppola père. Non seulement les protagonistes passent la majeure partie du film plâtrés, mais un acteur est commun aux deux métrages : Alden Ehrenreich qui, présent à une fête organisée dans la chambre de Johnny, lui demande conseil sur le jeu d’acteur. Simple clin d’oeil à l’œuvre de papa ou message caché sur la relation père / fille ? Mystère !

Malgré l’approche frontale de son sujet et une finalité évidente, Somewhere captive par sa séduisante simplicité qui témoigne du savoir-faire consommé de Sofia Coppola. La grande famille du cinéma, ne remplacera jamais les liens du sang.

4 étoiles

Article rédigé par Dom

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8 commentaires

  1. Content de trouver un nouvel avis positif sur le nouveau Sofia Coppola que je n’ai cessé de défendre. Belle analyse du film !

  2. Pas du tout aimé pour ma part, mais on est d’accord sur le savoir faire de la réalisatrice, bien que les scènes sont parfois un peu trop longues à mon humble avis. J’ai l’impression que Tetro est passé inaperçu , il est temps que je le regarde !

  3. J’ai à la fois envie d’aller le voir, et à la fois très peur de me faire chier

  4. @Squizzz, effectivement, le film ne reçoit que très peu d’éloges… J’ai l’impression que cetains reproches émis visent Sofia Coppola en personne, plutôt que l’oeuvre en elle-même.

    @Cyril, avec Tetro, on est dans le pur film d’auteur. Ca plait ou non, comme Somewhere !

  5. @Djool, c’est un risque à prendre ! Soit tu vas rentrer dans le film, et tout de même partager la torpeur du protagoniste, soit tu vas rester en dehors et là, tu risques de passer une heure et demi assez désagréable.

  6. Je valide.

    Une sauce Californication retravaillé par la fillette Coppola, c’est propre, clair, précis, et au final plutôt onctueux, bref, un film pour les amateurs « cunilaire ».

  7. Content que ça t’ait plu, mais le parallèle avec Californication est un peu tiré par les cheveux malgré des ingrédients plus ou moins similaires.

  8. Pour ma part, je me suis drôlement ennuyé. Pourtant c’est le genre de film que j’aime mais je ne sais pas pourquoi je n’ai pas accroché. Peut être les acteurs… je ne sais pas.

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